Le batteur Max Roach, l'un des fondateurs du mouvement bebop qui révolutionna le jazz avec Charlie Parker, Dizzy Gillespie, Bud Powell ou Clifford Brown, est décédé à l'âge de 83 ans. « Il est mort dans son sommeil », a annoncé un porte-parole de sa maison de disques Blue Note, Cem Kurosam. Max Roach était atteint d'un cancer depuis quelques années. Avant l'essor du bebop, le jazz était dominé par un swing orchestral destiné aux salles de danse, où les batteurs tenaient le tempo en privilégiant la caisse claire et la grosse caisse. Le bop confiait le rythme principal aux cymbales « ride » et « charleston », laissant intervenir plus librement les autres éléments de la batterie. En modifiant ainsi la façon de tenir le tempo, Roach et ses contemporains donnaient à la batterie une importance et un champ d'expression plus larges qui eurent pour effet de transformer la musique de danse populaire qu'était le jazz en une forme d'art que l'on appréciait assis dans un club, note Cem Kurosman, porte-parole de Blue Note. Maître de l'improvisation et de l'innovation rythmique, Max Roach a joué avec les plus grands musiciens de jazz du XXe siècle, de Sonny Rollins à Miles Davis avec qui il avait notamment enregistré Birth of the Cool. La mort accidentelle du trompettiste Clifford Brown l'avait beaucoup secoué. Il avait poursuivi sa carrière en enregistrant sous son nom, mais aussi avec Thelonious Monk ou Sonny Rollins. En 1958, il s'était engagé activement dans la défense des droits des Noirs américains, publiant des albums engagés tels que We insist ! Freedom Now suite, en 1960. Marié de 1962 à 1970 avec la chanteuse Abbey Lincoln, qui l'avait aidé à sortir d'années d'alcool et de drogue, il avait participé activement à la politique des années 1960 aux côtés de Martin Luther King et de Malcolm X. Il avait alors pris part également à l'émergence du « free jazz ». Cette musique est jouée par de petits groupes de musiciens. Dans l'esprit populaire, le free jazz est lourd, agressif et dissonant. Beaucoup de critiques pensent que l'abandon des éléments familiers du jazz est dû à un manque de technique de la part des musiciens. Ce point de vue est devenu marginal et cette musique a pu se construire une forte tradition. Présent sur la scène musicale tout au long de sa vie, Max Roach avait joué en 1985 avec Bernard Lubat, Manu Dibango et Salif Keita lors d'un concert pour la libération de Nelson Mandela. Il était parti en Afrique, notamment au Ghana à la recherche de nouveaux rythmes, et avait alors joué avec de nombreux groupes. Ultime exploit : il avait été accueilli au « Grammy Hall de la Gloire », sorte de Panthéon de la musique, en 1995. Avec sa mort, s'écroule tout un pan du patrimoine du jazz. Le maître rejoint la légende...