Le diagnostic de la néphrite aiguë survenue en août dernier à Sidi Bel Abbès vient enfin d'être posé. « Les résultats obtenus sont en faveur d'une infection à Hantavirus », a indiqué, hier, le professeur Guermouh de l'Institut Pasteur d'Alger (IPA), lors du regroupement national des 48 directeurs de la santé (DSP) à l'école paramédicale de Sidi Bel Abbès et présidé par Amar Tou, ministre de la Santé et de la Population. « Il est fort possible que ce Hantavirus soit d'un type probablement différent de celui de l'Europe (compagnon roussâtre) », a-t-il déclaré, ajoutant que pour le moment, il s'agit de connaître avec exactitude le type de cette infection à Hantavirus et d'en déterminer la chaîne de transmission. « Des techniques de biologie moléculaire sont utilisées pour détecter le virus et le classer », dira-t-il. Des techniques qui, a-t-il révélé, ne sont pas utilisées à l'Institut Pasteur d'Alger faute d'un équipement « adéquat ». Et d'expliquer que les Hantavirus appartiennent à la famille des Bunyaviride et dont le rongeur constitue le principal réservoir et vecteur. « Le virus est présent dans les urines, la salive, les excrétions du rongeur. Celui-ci une fois infecté ne présente aucun signe clinique de la maladie et secrète toute sa vie le virus. » Les sujets s'infectent directement et indirectement (aérosols, morsures, contacts), apprend-on. La famille des Bunyaviride, explique le professeur Guermouh, regroupe, entre autres virus, celui de la vallée du Rift, de Crimée Congo et le phlébovirus. La possibilité qu'il s'agisse d'un virus inconnu à ce jour n'est pas à écarter mais elle demeure « peu probable », ajoute-t-il, estimant cependant que les échantillons prélevés sur les malades ont été recueillis « trop tardivement » par rapport au début de la maladie. Commentant les résultats des analyses réalisées jusque-là, le professeur Guermouh a fait savoir que des antigènes Hantavirus plus spécifiques seront fin prêts vers le 13 septembre. Une tâche confiée à une équipe multidisciplinaire d'un laboratoire de référence sis à Marseille (France). « Les sérums tardifs étudiés à Alger leur seront adressés pour une étude comparative », signalera-t-il lors de l'exposé présenté à l'ouverture des travaux de cette rencontre. Ceci dit, des « failles » ont été relevées dans le diagnostic de la maladie. Pour y remédier, le ministère de la Santé envisage le renforcement de l'unité du laboratoire de l'Institut Pasteur d'Alger chargé du diagnostic et de la surveillance des maladies émergentes. Il est question également de lancer une enquête sérologique sur le territoire national dès la caractérisation du virus. Une mesure jugée « nécessaire » par le professeur Guermouh. La décentralisation du diagnostic sérologique et la formation de techniciens spécialisés s'avèrent ainsi indispensables. Pour sa part, le docteur Merbout, du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, a affirmé que la recherche de l'étiologie virale de l'épidémie de néphropathie qui s'est déclarée à Sidi Bel Abbès s'est faite sur la base des données établies dans le cadre d'un travail « rigoureux » de l'équipe pluridisciplinaire formée de différents spécialistes. A ce jour, 98 cas (en nombre cumulé) ont été recensés dont un cas hospitalisé le 5 septembre, selon le bilan établi par la direction de la santé. Par ailleurs, le ministre de la Santé, Amar Tou, a affirmé, en marge de la rencontre d'hier, que les résultats auxquels sont parvenues les équipes pluridisciplinaires d'Oran, d'Alger et de Sidi Bel Abbès constituent pour l'Algérie une « première en matière scientifique ». Aussi considère-t-il que sur le plan de la gestion et de la démarche scientifique, le diagnostic du syndrome néphrétique est une « réussite ». Un satisfecit que ne semblent pas partager certains médecins spécialistes présents à cette rencontre et qui affirment que même si la maladie ne débouche pas sur l'hémodialyse et n'a pas fait de décès, les risques de récidive sont « importants ».