Rencontrée au Festival du Cinéma de Namur, Biyouna, naturelle, drôle, la tête pleine de projets s'est confiée à nous... Travailler avec Mokhneche semble vous ravir... J'adore travailler avec lui Je découvre et j'apprends beaucoup de choses, notamment la tragédie, il me dirige bien. En Algérie, j'ai travaillé avec les anciens (Ifticène, Mustapha Kateb, Mustapha Badie…), mais ces derniers temps, on m'a trop collé l'étiquette de la comique. Moknèche a fait sortir en moi la tragédie, et beaucoup d'autres choses. Dans Délice Paloma, mon personnage était très difficile, c'était un rôle de composition. On a répété pendant deux mois, des tirades et des tirades. On dit que vous pourriez être un des personnages d'Almodovar… C'est un grand honneur ! On compare beaucoup Nadir à Fellini et à Almodovar. Il a un peu des deux, mais il a beaucoup de Nadir Moknèche ! En Algérie, il y a beaucoup de choses à faire ; il y a beaucoup d'inspiration là-bas, et c'est ce qu'il a, lui. Viva Lladjérie a été très critiqué chez nous… C'est par rapport à la scène d'amour. tous les algériens ont la parabole, si c'était fait par un américain ou un italien, ç'aurait été normal. Quand c'est un algérien, il n'a pas le droit, il faut arrêter. Je sais ce que c'est : en Algérie on nous censure, je vois les programmes de ce ramadhan. On me demande de parler en arabe littéraire, je ne peux pas. Je parle le dialectal, c'est ma langue. On ne peut même pas jouer le rôle d'une prostituée, d'une clocharde ou d'une mafieuse. On ne peut pas faire ce qu'on veut. Je ne peux pas travailler dans ces conditions. Quand on raconte une histoire, il faut la raconter à fond. pourquoi faire des détours ? Tout le monde est honnête, tout le monde est beau, gentil. Mais c'est pas la réalité. qu'est-ce qu'elle porte l'Algérie ! Comment réagissent vos enfants ? Normalement. bon, par pudeur, quand ils voient une scène, ils baissent la tête, mais ils savent bien que leur maman est comédienne. Je ne veux pas rester « locale », je veux être une comédienne internationale, inch'Allah, et ça commence à bien marcher. Pour une femme qui est sortie la première fois en1999, c'est pas mal quand même. Dieu merci. Grâce à Moknèche et à mon travail, je commence à percer : des concerts, des séries TV sur Canal + et France 2, une grande tournée de 65 escales avec Jane Birkin pour Electre de Sophocle, où je joue le rôle du Coryphée (mise en scène de Philippe Calvario)... En Algérie, les gens du théâtre n'ont pas cru en moi. Ils veulent rester entre eux, « zitna fi dqiqna ». Ils nous chassent comme si on n'avait pas droit de cité. Eh bien moi, j'y ai droit, H'na ymout Kaci. L'Algérie est à moi et la télévision aussi. Tout change, les gens assis sur la chaise changent, les comédiens restent. Avez-vous d'autres projets avec Nadir Moknèche ? Oui, on a plein de projets ensemble. On prépare quelque chose qui va beaucoup étonner, mais on ne peut rien dire pour l'instant ! Blonde platine dans la Casbah est un bel album, êtes-vous déjà sur le suivant ? justement, la semaine prochaine, j'ai rendez-vous avec mon producteur. Pour l'instant, je réfléchis et je suis à la recherche de paroliers. Je compte aller à Alger pour ça et j'ai envie de chanter en kabyle. Je voudrais faire un peu de tout, en français et en algérien aussi.