Hier matin, alors que je m'apprêtais à rejoindre mon job, je me frayai un chemin au milieu d'une cohue de chérubins. Mon regard fut attiré par un écolier frais émoulu, éprouvé par l'effet de son lourd sac à dos. J'engageai une sympathique discussion avec Malek, dont les frêles épaules ployaient quasiment sous la charge de son fardeau d'objets scolaires. Je partageai quelques pas en sa compagnie, histoire de le soulager de son sac volumineux qu'il traînait non sans peine. Ses camarades, eux, trimballaient un sac à dos avec roulettes ou des cartables pleins à craquer… Tellement pesants étaient leurs « besaces » que je les confondais au lest porté par les pratiquants de l'escalade de montagne. Cela ne me rappelait pas moins aussi les fortes charges greffées au dos des bidasses qu'on aguerrit dans les champs d'entraînement. J'avais un pincement au cœur en voyant ces potaches, ces tronches joyeuses dont l'épine dorsale est mise à rude contribution. Des enfants pas plus haut que trois pommes supportant chaque jour que Dieu fait une telle surcharge pondérale pour rallier, à travers nos trottoirs cahoteux, leur école. Un véritable supplice pour ces « petits anges » de sept ou huit ans ne pesant pas plus de 25 kg. Bien qu'il n'existe pas de réglementation en la matière, faut-il souligner à juste titre que la limite conseillée pour le poids d'un cartable se situe autour de 10% du poids de l'enfant ? Ce qui n'est pas le cas lorsque nous croisons des bambins tractant une surcharge de livres et de cahiers pendant une demi-heure, voire une heure pour certains qui doivent, sous une pluie battante, rejoindre l'établissement à pied. Ils arrivent vannés avant la levée des couleurs... Le ministère de l'Education nationale a-t-il vent de ce « châtiment » infligé journellement à nos garçonnets dont l'âge tendre ne permet pas une aussi dure corvée ? Autrefois, nous disposions de casiers dans nos classes et nous n'étions pas contraints, pour les besoins de nos cours, de nous plier à toute cette punition. L'emploi du temps bien concocté par les pédagogues et leur bon sens nous épargnaient bien de traîner des charges inutiles. « Mais cela est une autre question », me susurre mon ami Kamel.