La rage est à son comble sur le front social et rien ne semble venir pour la contenir. A Annaba, la grogne s'est vite transformée en émeutes entre jeunes chômeurs et forces de l'ordre. Annaba. De notre bureau Encore une fois, plusieurs centaines de jeunes chômeurs de la commune de Sidi Amar (El Hadjar) ont manifesté hier leur colère devant l'entreprise du groupe indien de la sidérurgie Arcelor-Mittal Annaba. L'accès principal a été le premier à être bloqué par les jeunes chômeurs qui revendiquaient comme d'habitude l'embauche. Devant l'insistance des manifestants, les services de sécurité ont dû recourir aux lances d'arrosage des pompiers des services de sécurité d'Arcelor-Mittal Annaba pour disperser les attroupements. Ce qui a limité la durée de ce mouvement à une demi-heure. « Nous sommes des jeunes diplômés en chômage depuis des années. Nous sommes ici pour rappeler au président-directeur général adjoint d'Arcelor-Mittal Annaba ses engagements pour procéder au recrutement de 500 nouveaux travailleurs dès le début de l'année 2008. Nous attendons depuis juin 2007 que l'opération de recrutement annoncée par la direction générale soit entamée. Devant ces fausses promesses, il faut provoquer quotidiennement des manifestations, voire des émeutes pour être entendus. Nous en ferons encore et toujours », diront sur un ton coléreux plusieurs jeunes manifestants. « Pour avoir un poste de travail à Arcelor-Mittal, il faut la tchippa. Je vous mets au défi. Si j'avais 10 millions à verser à un syndicaliste ou à un cadre supérieur j'aurais un poste immédiatement. Tout le monde ici paye pour travailler, y compris les entreprises privées. Ces dernières doivent payer la dîme pour avoir un plan de charge. Et on se pose des questions sur ce qui motive les jeunes à se transformer en kamikazes ou harraga ! Ce n'est pas sorcier. Ce sont ces mêmes pratiques qui rendent les jeunes psychologiquement vulnérables, si bien qu'ils choisissent la mort de leur propre gré », abonderont d'autres avant de revenir, dans l'après-midi, à la charge. Ils ont récidivé pour bloquer les trois accès de Bergouga (la cokerie), le poste de Sidi Amar et celui d'El Hadjar. Toutes les issues ont été fermées au mouvement du personnel et des clients de l'entreprise, les travailleurs en fin de poste n'ont pas pu quitter l'entreprise pour rentrer chez eux. Cette fois-ci, c'est l'escadron antiémeute de l'unité de gendarmerie d'El Hadjar qui est intervenu avec les grands moyens. Devant la fermeté des jeunes manifestants à se faire entendre, les éléments de la gendarmerie ont usé de bombes lacrymogènes pour disperser les attroupements des jeunes chômeurs. Ce qui a transformé le mouvement de protestation en émeute. Le terme est approprié puisque les éléments de la gendarmerie ont dû affronter les émeutiers et procéder à l'arrestation de plusieurs d'entre eux pour libérer, vers 17h, la voie devant les bus du transport de personnel. Du côté de la direction générale comme celui du syndicat des travailleurs, rien ne filtre. C'est la fuite en avant qui semble être la solution devant ce qui s'apparente à un mouvement de colère qui ne semble pas connaître son épilogue. Ainsi, jour après jour, ces mouvements de colère se répètent et prennent de l'ampleur dans le nombre et dans les actes. Dans le nombre, car ce mouvement est devenu contagieux et les rangs des manifestants ne cessent de grossir. Dans l'acte, puisque la colère des jeunes protestataires n'est plus contrôlable. D'autant que leur manifestation intervient au moment où le complexe sidérurgique Arcelor-Mittal a connu une vaste opération de départ à la retraite. Une opération qui a touché 1500 travailleurs et dont les postes vacants n'ont pas été dotés jusqu'à ce jour. Rappelons que le groupe Arcelor-Mittal qui emploie plus de 8000 salariés a vu ce week-end l'explosion de son convertisseur de l'aciérie n°2. Ce qui a généré la paralysie de plusieurs autres. Pour le groupe, les conséquences de cet important incident sont très lourdes. Cet atelier est l'un des principaux fournisseurs en produits semi-finis, des autres ateliers spécialisés dans les produits longs tels le rond à béton et les bobines de tôle.