Une lettre en appelle à l'intervention du SG de l'instance exécutive du FLN, pour dégommer le recteur de l'université et le remplacer par un cadre militant issu des rangs de l'ex-parti unique. Le document ne devait sans doute pas sortir du bureau de la coordinatrice du FLN dans la wilaya de Béjaïa, mais une main a jugé profitable d'en faire photocopie et de le faire circuler, balançant une épaisse mèche de cheveux dans la soupe glauque de la crise que connaît l'université depuis le mois de novembre dernier. La lettre, signée par la première responsable du parti dans la wilaya, en appelle à l'intervention du secrétaire général de l'instance exécutive du FLN, qui n'est autre que le chef du gouvernement, pour dégommer le recteur de l'université et le remplacer par un cadre militant issu des rangs de l'ex-parti unique. Le document, qui circule dans le milieu universitaire, a atterri dans certaines rédactions, et semble désormais avoir été engagé comme une carte à jouer aussi bien pour régler des comptes à l'université que dans la maison tourmentée du FLN, local. Gênée par la tournure prise par les événements, Mme Fourar, signataire de la fameuse missive, ne trouve pas les mots pour convaincre qu'elle n'a commis aucun écrit qui s'en prendrait au recteur, même si elle avoue avoir transmis à M. Belkhadem la proposition de promouvoir un cadre militant du parti. Il y aurait donc un faux ou rajout malintentionné ; mais sur cette possibilité, notre interlocutrice dit ne pas trop vouloir « polémiquer ». L'ex-députée ne s'attarde pas trop également sur cette contradiction par laquelle elle voudrait faire croire que l'on peut proposer la promotion d'un cadre à une fonction si l'on ne propose pas du même coup le départ de celui qui l'occupe déjà. Dans le document, daté du 6 décembre dernier et décliné comme « proposition de promotion pour les cadres du FLN à Béjaïa », le réquisitoire dressé à l'encontre de Djoudi Merabet s'appuie presque exclusivement sur son animosité supposée envers les cadres universitaires issus du FLN. On demande représailles d'abord, en s'émouvant accessoirement du sort triste subi par l'université. L'on va ainsi jusqu'à déterrer des antécédents de sabordage qu'aurait commis le même recteur pour « perturber » la tenue de l'université d'été du FLN en août 2006 à Béjaïa. Enfin, au cas où l'on se poserait des questions sur l'hostilité pugnace du premier responsable de l'université, la missive balance l'ultime explication : le recteur émargerait au RND. Tant et si bien qu'il serait l'architecte de l'avortement de l'alliance entre le FLN et le RND pour l'élection du président de l'APW de Béjaïa. Le rapport avec l'université ? En « débauchant » les élus RND à l'APW et en les éloignant de la fameuse alliance avec le FLN, soutient la missive, M. Merabet aurait tout simplement déjoué la perspective de voir la tête de liste FLN postuler sérieusement à la présidence de l'assemblée de wilaya. Or, c'est la même tête de liste, M. Derradji, enseignant, ayant assumé des responsabilités pédagogiques à l'université, qui est proposé par l'instance locale du FLN comme successeur souhaité de M. Merabet. Un investissement qui rapporterait gros. « C'est à travers ce militant que nous pourrons pénétrer l'université pour attirer et mobiliser des cadres, des groupes d'étudiants et de travailleurs dans les rangs de notre parti (…) », démarche la missive dont la franchise laisse croire que ce genre d'épistolaires est monnaie courante dans les augustes mouhafadhas. La circulation du document, en dehors des circuits fermés de la maison FLN, au-delà du fait qu'il trahit bien les dissensions qui la minent localement, donne un aperçu sur la conception que l'on se fait de la fameuse « thakafat eddewla » (culture de l'Etat) dans ces mêmes cercles qui en font un leitmotiv dans ces partitions-fleuve sur la bonne gouvernance. Il serait donc admis que des responsables d'institutions publiques, et en l'occurrence nommés sur décret présidentiel, soient soumis à l'appréciation de cadres politiques dans une déclinaison qui rappelle, au bon souvenir de l'Algérie du multipartisme, le fameux article 120.