L'ambiance chaleureuse qui règne dans les rues grouillantes fait oublier le froid arctique de la ville. Partout, des lanternes rouges pendent aux devantures des magasins pour mieux marquer les moments forts de la fête. C'est le rituel annuel du festival de la neige et de la glace, depuis sa reprise en 1985. Pour la circonstance, les parcs publics s'animent d'un travail de fourmis. Des dizaines d'artistes s'affairent, par groupes, devant un amas de glace pour réaliser des sculptures toutes proposées à arracher le premier prix du concours organisé à cette occasion. Le même élan d'enthousiasme est perceptible chez les bâtisseurs de l'immense cité éphémère. Les organisateurs nous apprennent qu'il a suffi d'une vingtaine de jours pour donner forme à cette ville de quelque 400 km2. A l'intérieur, les sculptures rivalisent de beauté d'exécution, de couleurs, de lumières enfouies sous la glace. Pourtant, au milieu de ces chefs d'œuvre, une tour retient tous les regards. Elle est en quelque sorte la vedette de l'année parce qu'elle porte en elle la mascotte des jeux olympiques que Pékin que compte organiser la Chine dans les tout prochains mois. Devant tant de spectacle féérique, la masse des touristes part à la recherche d'un point culminant capable de leur offrir une vue générale sur la ville de rêve pour pouvoir enfin l'immortaliser en la filmant ou en cliquant sur le déclencheur d'un appareil photo. C'est bien là l'ultime geste protecteur contre l'inéluctable fonte de neige et de glace accompagnant les premiers rayons de soleil de printemps. Et c'est avec un pincement au cœur que nous quittons cet endroit si merveilleux pour nous plonger dans l'autre ville moins rêveuse, mais tout aussi agréable à vivre malgré les -23 degrés ambiants. Les gens vaquent à leurs occupations sans aucun signe d'hommes polaires. Tel n'est pas le cas pour nous qui faisons, sans doute, l'attraction du jour ! Dans l'ensemble, Harbin respire la richesse. De grandes artères alignent à l'infini de beaux magasins aux multiples marques étrangères. Des enseignes de sociétés multinationales se mêlent harmonieusement au décor urbain de la capitale de la province de Heilongiiang. Au milieu de la circulation très fluide, beaucoup de taxis aux couleurs vert et jaune — principalement des Jetta allemandes — transportent leurs clients. Curieusement, le siège du chauffeur est séparé du reste de l'habitacle par des barres métalliques qui constituent pour nous la seule fausse note qui tranche avec la quiétude ambiante. Par endroits, de grandes cheminées crachent un nuage de fumée. Il s'agit des installations du système de distribution de la chaleur dans les foyers. N'empêche que des tricycles aménagés font la ronde dans les rues moins exposées pour proposer leur cargaison de charbon à d'éventuels clients. D'autres vélos déplacent d'énormes masses de produits de récupération en tous genres. Les petits secrets de la ville de Harbin n'en finissent pas de nous surprendre. Après toutes les curiosités en surface, un autres univers beaucoup plus grouillant et hétéroclite se tient dans le sous-sol de la ville. Des marchés en tous genres s'étendent à perte de vue. Dans ces endroits peu conseillés par nos accompagnateurs, il faut toujours négocier les prix. Les bonnes occasions ne manquent pas aux gens qui savent se montrer patients et surtout qui peuvent supporter l'atmosphère si lourde et suffocante des entrailles de la terre. Heureusement, en surface, la fête reprend. Elle annonce le nouvel an chinois.