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Les grandes manœuvres
L'après-législatives au Pakistan
Publié dans El Watan le 12 - 03 - 2008

L'opposition, malgré ses divisions, entend pousser jusqu'au bout le bénéfice politique de sa victoire, en nouant des alliances avant même d'exercer le pouvoir.
Le président Pervez Musharraf, qui vient de perdre le contrôle du Parlement après les élections législatives du 18 février dernier, entend visiblement desserrer l'étau que l'opposition, victorieuse de ce scrutin, entend lui imposer, ou encore lui signifier une fin de parcours. C'est-à- dire qu'il ne pourra même plus inaugurer les chrysantèmes comme il est d'usage dans de tels cas. L'opposition, malgré ses divisions, entend quant à elle pousser jusqu'au bout le bénéfice politique de sa victoire, en nouant des alliances avant même d'exercer le pouvoir. C'est pourquoi, le président Musharraf a consulté lundi dernier ses conseillers juridiques, au lendemain de la signature formelle d'un accord des chefs des partis de l'opposition pakistanaise, qui demandent le rétablissement des juges évincés en novembre. Le président Musharraf n'a pas l'intention de démissionner si ces juges sont réintégrés dans leurs fonctions, a déclaré un de ses proches. Interrogé pour savoir si le Président allait démissionner après le retour des juges, l'ancien vice-ministre de l'Information Tariq Azeem, un proche de Musharraf, a déclaré : « Cela ne semble pas devoir être le cas ». « Il est difficile de prévoir ce qui va se passer », a toutefois nuancé M. Azeem membre de la Ligue musulmane du Pakistan (PML-Q), favorable au chef de l'Etat. « La question est de savoir maintenant comment ils peuvent faire (pour réintégrer les juges, ndlr) par la voie parlementaire, à la majorité simple ou à la majorité des deux tiers. C'est une question juridique », a-t-il poursuivi. « Le président a toujours dit qu'il se soumettrait aux avis de la Cour suprême et aux décisions parlementaires. S'il y a un désaccord, il peut être tranché par la justice », a-t-il souligné. Première conséquence de ce forcing, le président Musharraf a décidé de convoquer le 17 mars, la nouvelle Assemblée nationale, issue des élections législatives du 18 février. Dimanche, les deux chefs de l'opposition, Asif Ali Zardari, veuf de l'ancien Premier ministre Benazir Bhutto assassinée le 27 décembre, et Nawaz Sharif avaient demandé au président Musharraf de réunir l'Assemblée immédiatement. Lundi, le secrétariat du Premier ministre de transition, Mohammedmian Soomro, a fait savoir que celui-ci avait fait parvenir à M. Musharraf une recommandation formelle, une étape préalable et indispensable pour réunir l'Assemblée nationale. Effectivement, Asif Ali Zardari et Nawaz Sharif ont signé dimanche un accord pour former un gouvernement de coalition. Les vainqueurs des législatives de février dernier se sont également mis d'accord pour obtenir le rétablissement dans leurs fonctions les juges évincés par le président Musharraf. M. Zardari dirige de facto le PPP, qui a enlevé le plus grand nombre de sièges et a remporté avec la Ligue musulmane du Pakistan-Nawaz (PML-N) de l'ancien Premier ministre Nawaz Sharif la victoire sur les alliés politiques du président Pervez Musharraf. « Le PPP et la PML-N ont décidé de former un partenariat de coalition pour un Pakistan démocratique, afin d'appliquer le mandat confié par le peuple pakistanais aux forces démocratiques lors des élections du 18 février 2008 », a déclaré M. Sharif. En ce qui concerne la revendication de l'opposition, elle est, bien entendu, à la fois forte et symbolique, car elle obligera Musharraf à se renier, en revenant sur une décision qu'il avait prise, avec tout ce que cela implique au plan politique, à commencer bien sûr par sa propre personne. Le chef de l'Etat avait décrété l'état d'urgence le 3 novembre 2007 et, dès le lendemain, avait évincé plus de 60 juges, dont la majorité était de la Cour suprême. S'ils sont rétablis dans leurs fonctions, les juges, parmi lesquels l'ex-président de la Cour, Iftikhar Muhammad Chaudhry, seraient amenés à se prononcer sur la légalité de la récente réélection du chef de l'Etat. Jusqu'alors, le sort des juges évincés constituait la pomme de discorde entre Asif Ali Zardari et Nawaz Sharif.

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