Skikda, sa ville natale et sa capitale politique, sera toujours une station de jouvence vers laquelle Djaballah est toujours retourné pour se ressourcer, mais aussi pour valoriser, au diapason de ses assises, sa position. Et dans l'actuelle tourmente que vit El Islah, Djaballah ne pouvait omettre de revenir à ses origines. Pour une raison ou pour une autre. Car jeudi dernier, le leader du Mouvement El Islah était à Skikda. Une visite « à caractère purement personnel », insistait-on dans les milieux du mouvement, puisque, précise-t-on, « le cheïkh est venu assister à une fête familiale ». Mais ce motif n'a pas pour autant empêché Djaballah de rencontrer une partie de ses militants à la salle Aïssat Idir. Entouré d'un de ses députés et des quelques élus locaux, il prononcera, comme à son habitude, un discours aux consonances aussi politiques que théologiques. Ne donnant aucunement l'impression de vouloir s'attaquer directement à ses détracteurs, Djaballah imprégnera son allocution de versets coraniques dont la perception semblait a priori répondre amplement à la conjoncture conflictuelle que vit El Islah. Volontairement ou pas, le cheïkh s'étalera à nuancer le « signifié » du « signifiant » en faisant allusion à ce qui se dit. « On remarque, dira-t-il, que l'énoncé de certains est enveloppé d'un vocable captivant dont le fond est d'une nature totalement néfaste. » Il osera même une comparaison chiites et autres Khaouredj, mais à aucun moment le cheïkh ne s'aventura à assimiler ses exemples aux frondeurs du mouvement. Djaballah tentera, par la suite, un bref passage à évoquer les dangers des amendements du code de la famille et de la loi de finances en revenant à la charge pour dénoncer « ces amendements qui s'inscrivent contre la femme, la famille et les enfants », en poursuivant : « C'est une agression contre la femme et les textes sacrés, quant à la nouvelle loi de finances, on s'est arrangé à la tailler sur mesure pour s'offrir une opportunité financière afin de combler les trous. » Et d'expliquer : « Alors que le prix du baril est à 35 dollars, on s'est aventuré à projeter la loi de finances, sur la base de 19 dollars le baril. » Après cette brève « interruption », Djaballah tempérera subitement ses ardeurs d'orateur en s'adressant aux présents. « Vous voudriez certainement que je vous parle de ce qui se dit autour de nous dans la presse. » Une introduction qui permettra par la suite à Djaballah de juger que « si on parle autant de nous, c'est que notre mouvement est vraiment fort et cela témoigne de notre présence sur la scène nationale. Il y a pourtant d'autres partis qui vivent de grands problèmes, mais on en parle de temps à autre seulement, alors qu'El Islah ne cesse de faire la une. » Suite à quoi, le cheïkh demandera à ses partisans de « ne pas trop s'intéresser à ces délayages », car, mentionnera-t-il, « ce que vit notre mouvement est un signe de bonne santé et un fait prouvant que nous sommes forts ». Emporté, le cheïkh laissera glisser une révélation plus ou moins lourde de sens en déclarant : « Nous ne sommes qu'au temps additionnel car le véritable congrès du mouvement s'est déjà tenu au mois d'août (université d'été tenue à Skikda, ndlr). » Est-ce là une réponse aux frondeurs du mouvement qui leur signifierait que le cheïkh dispose largement de l'aval de la base ou ne serait-ce qu'un message codé adressé au conseil de la choura. Djaballah poursuivra en déclarant : « Le mouvement continue de préparer son congrès, car c'est là la volonté de ces mêmes commissions établies lors de la réunion de Zéralda en mai 2004. Il faut respecter la légalité. Le congrès aura lieu avant la fin de l'année comme convenu et il sera pour le mouvement un pas décisif et qualificatif. » L'orateur, dans une placidité peu coutumière, fera part aux présents qu'il avait, la semaine dernière, déclaré à « nos frères du mouvement et même aux contestataires que le mouvement est le leur et que tout le monde est appelé à préparer le congrès sans exclusion ».