Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) vient de connaître la crise la plus grave de son existence, au point où il a failli imploser. La bataille rangée entre un Bouguerra Soltani qui veut un deuxième mandat et un Abdelmadjid Menasra qui rêve d'être à la tête du parti a scindé le parti en deux clans qui se sont affrontés durant trois longues journées, à la Coupole du 5 Juillet (Alger), où se déroulent les travaux du 4e congrès. Des journées durant lesquelles Bouguerra Soltani a réussi à faire annuler toutes les décisions prises par la commission de préparation du congrès, en les soumettant au vote des congressistes qui lui sont majoritairement acquis. Ainsi, l'ordre du jour du congrès, son règlement intérieur et son bureau, proposés par la commission, ont été annulés pour être totalement changés par les congressistes. Bouguerra Soltani arrache un compromis qui permet à ses représentants de prendre part à toutes les décisions. La balance a finalement penché de son côté et tout le monde en a pris conscience. Les trois partisans de Abdelmadjid Menasra jouent alors la carte du blocage, en se retirant du bureau du congrès nouvellement installé et composé de six membres (trois proches de Menasra et trois autres de Bouguerra). La crise atteint son paroxysme, après deux jours de tractations et de sueurs. La situation est tellement grave que la direction du parti a fait appel à l'intervention d'un « comité d'apaisement », une sorte d'instance de sages qui joue le rôle de médiation. Hier, profitant de la prière du vendredi, le président du bureau déchu du congrès et membre du comité d'apaisement, M. Mahdjoubi, prononce un prêche prônant « l'unité des rangs » et à une solution « salvatrice » qui aide le parti à éviter « la scission ». Ce qui contraint Menasra, contre toute attente, à annoncer publiquement, en larmes, son retrait de la course, en dépit du refus de ses partisans. Ces derniers, déçus, ne lâchent pas prise. Ils persistent à maintenir leur position de retrait du bureau, estimant que l'amendement de l'article 61 du statut du parti, proposé par le clan de Bouguerra Soltani, n'est pas du ressort du congrès. L'article en question stipule que le président du parti doit être élu par le conseil consultatif (madjliss echoura) et tout amendement du statut doit être proposé par le conseil et examiné par le congrès. Bouguerra veut à tout prix arracher la dernière épine qui lui reste sur la voie du deuxième mandat, en écartant du jeu un madjliss echoura majoritairement en sa défaveur. Finalement, le comité d'apaisement a fait accepter à Bouguerra Soltani le principe de ne pas toucher à cet article et de se faire élire en tant que candidat unique par une nouvelle composante du madjliss echoura. En effet, ce dernier devait être élu durant la soirée d'hier après l'examen du bilan moral et financier. Les membres du bureau qui s'étaient retirés par protestation ont fini par rejoindre les travaux du congrès après que le compromis eut été trouvé. Sans surprise, les pronostics disent tous que Bouguerra Soltani succédera à lui-même. Ainsi, pour la première fois dans l'histoire du MSP, la discipline a disparu pour laisser place à la bataille autour du pouvoir. L'enjeu n'est nullement le troisième mandat de Bouteflika, comme l'avancent certains. Le MSP a, depuis Mahfoud Nahnah, adopté « le principe de la participation et du refus de l'aventure politique qui mène vers l'éclatement ». Les deux candidats, Bouguerra et Menasra, sont sur les mêmes positions. L'enjeu se situe principalement dans le pouvoir et des avantages que celui-ci suppose.