L'Algérien Azzedine Gaci, Union des organisations islamiques de France (UOIF), candidat unique, a été réélu à la tête du Conseil régional du culte musulman (CRCM) Rhône-Alpes. La liste de rassemblement qu'il avait conduite en juin lors du renouvellement des instances musulmanes, soutenue par plusieurs fédérations et mosquées indépendantes, avait obtenu 50,5% des voix devant les listes du Rassemblement des musulmans de France, dont est issu le Marocain Mohamed Moussaoui, nouveau président du Conseil français du culte musulman, et Ditib (Turcs) qui avaient recueilli respectivement 34,7% et 14,8% des voix. Elu une première fois en 2003, il est tenace, situant son élection dans le cadre d'un vaste chantier. Le physicien, imam de Villeurbanne, a bien voulu en replacer pour nous les enjeux. Vous parlez d'Islam de France et pas d'Islam en France, pouvez-vous préciser ? Il s'agit d'un Islam qui tient compte de la réalité de ce que vivent les musulmans de France. On ne peut pas vivre et parler d'Islam de la même façon à quelqu'un dans le sud du Sahara et à celui qui habite au pied de la tour Eiffel, dans une société sécularisée, qui ne met pas Dieu au centre de son cœur. Où en est-on de la formation des imams ? Aucun dossier envisagé par le CFCM n'a véritablement avancé et le plus important est la formation. Il faut des imams qui parlent français. Les besoins seraient de 1500 imams. Il faut que l'administration française cesse de se cacher derrière l'argumentation de la sacro-sainte laïcité. J'appelle les autorités à nous aider et qu'on édifie l'institut en Alsace à Strasbourg, où la loi de 1905 ne s'applique pas. Là, il y a une faculté pour les catholiques, pour les protestants, pour les juifs, pourquoi pas une pour les musulmans ? L'autre question sera celle du statut de l'imam qui n'existe pas encore, pour lui permettre de vivre dignement, dans le respect, mais aussi sereinement face aux tracasseries administratives au moment de renouveler le titre de séjour. Vous avez fait un grand pas en direction des chrétiens en faisant avec eux le voyage de Tibhirine en 2007. Quelles en sont les suites ? Il y a eu depuis plusieurs rencontres islamo-chrétiennes dans la région et surtout une première réunion d'importance entre imams et prêtres, à Lyon en novembre 2007, avec 120 imams et 80 prêtres, dans un lycée catholique, sous l'intitulé « Imams et prêtres, mieux se connaître pour agir ensemble ». Quels sont pour ce mandat les impératifs du CRCM ? Il y en a plusieurs : la construction et la remise aux normes des mosquées, l'abattage rituel, les aumôneries des prisons, des hôpitaux et des armées, la mise en place des carrés musulmans dans les cimetières, la formation des imams, la continuation du dialogue interreligieux et enfin un dossier sur lequel on va beaucoup travailler : l'organisation et le contrôle du pèlerinage à La Mecque. 30 000 pèlerins partent de France, c'est beaucoup, comparé aux 35 000 d'Algérie ou du Maroc ou les 11 000 de la Tunisie. Le prix est de 3000 euros en moyenne par personne, ce qui fait une manne, avec l'Omra, de 120 à 150 millions d'euros. Cela attire du monde y compris ceux qui n'ont rien à voir avec ce cinquième pilier de l'Islam, avec des problèmes d'escroquerie, car en France, n'importe qui peut organiser ce voyage. Cette année, il y a eu 500 plaintes. Un véritable commerce de la foi est en train de se développer en France. Au CRCM, nous voulons apporter un peu d'ordre en émettant dans un premier temps un guide du pèlerin, deuxièmement obliger les voyagistes à rédiger un contrat type de voyage clairement établi, avec une feuille de route informative, et enfin troisièmement la rédaction d'une charte du voyagiste pour ce type de produit qui l'engage.