Nicolas Sarkozy, chef de l'Etat français et président du Conseil européen, veut-il faire du Sommet de l'union pour la Méditerranée qui réunit aujourd'hui 44 chefs d'Etat et de gouvernement, dont treize arabes, le cadre de la normalisation des relations israélo-arabes ? Et faire de Paris la capitale de la paix israélo-arabe ? En visite d'Etat au Maroc en octobre 2007, le président Sarkozy avait laissé entendre que la reproduction de l'expérience de la construction européenne à l'échelle des pays de la Méditerranée est le meilleur moyen de sortir du « cycle infernal de la vengeance et de la haine » entre Israël et les Arabes. Le programme officiel du Sommet de l'union pour la Méditerranée qui se tient aujourd'hui, communiqué par l'Elysée, n'a d'ailleurs pas manqué d'indiquer à l'avance que le président Sarkozy s'entretiendrait avec le président libanais, Michel Sleimane, et le président syrien, Bachar Al Assad. Que Nicolas Sarkozy s'entretienne tour à tour avec le président syrien puis avec le président libanais, serait-ce dans le but d'aplanir les différends qui opposent les deux pays ? Proposer une médiation ? Des apartés Al Assad - Sleimane, Al Assad - Olmert auront-ils lieu ? Le président Bachir Al Assad, pour qui ce sommet est l'occasion de rompre l'isolement diplomatique de la Syrie en Europe, affirmait dans une interview au Figaro que « la France a une position internationale importante. Cela nous ouvre donc une grande porte sur la scène internationale. Ma visite est importante pour plusieurs raisons. D'abord, parce que nous assistons à une rupture entre la politique actuelle de la France et la politique du passé. Cette nouvelle politique est plus réaliste et correspond davantage aux intérêts de nos deux pays. C'est une base solide pour renouer une relation saine. Ensuite, le moment de ma visite est important, car elle coïncide avec la relance des négociations avec Israël et la fin de la crise libanaise dans laquelle la Syrie s'est impliquée. C'est enfin une occasion pour l'Europe, et notamment pour la France, de jouer un rôle dans la résolution de plusieurs questions concernant notre région. Cette visite est pour moi une visite historique : une ouverture vers la France et vers l'Europe ». S'il est difficile pour l'heure de répondre à ces questions, il reste que de nombreux observateurs ont estimé que ces rencontres devraient participer au moins à faire baisser la tension entre le Liban et la Syrie. L'appréciation ne fut pas fausse puisque le président libanais, Michel Sleimane, s'est déclaré hier favorable à « un échange d'ambassadeurs » et à l'instauration de relations diplomatiques avec la Syrie, à l'issue d'un entretien de trois quarts d'heure à l'Elysée avec son homologue français Nicolas Sarkozy. De son côté, le président syrien, Bachar Al Assad, a fait part aussi à son homologue français de sa « forte détermination » à « établir des relations diplomatiques avec le Liban », selon un communiqué franco-syrien publié à l'issue de leur rencontre. Autre annonce : aujourd'hui à 11h, le président Sarkozy, le Premier ministre israélien, Ehoud Olmert, et le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, feront une déclaration devant la presse. Ces séquences diplomatiques augureraient-elles d'annonces sous les flashes des caméras du monde entier présentes à Paris pour le lancement de l'union pour la Méditerranée ? Nicolas Sarkozy chercherait-il à conclure une action d'éclat en marge d'un événement préparé activement depuis de longs mois ? Serait-ce une réponse aux pays arabes qui considèrent que la politique de la France et de l'Union européenne sur le conflit israélo-palestinien est déséquilibrée et nettement en faveur d'Israël ? La journée d'aujourd'hui pourrait peut-être apporter quelques éléments de réponse. Néanmoins, il reste que la Ligue arabe n'a pas apprécié la démarche de la diplomatie française de tenter de normaliser les relations israélo-arabes en dehors des résolutions de l'ONU et du Plan de paix qu'elle a adopté en 2002 à Beyrouth. Celui-ci comporte notamment une résolution essentielle – confirmée encore lors du dernier sommet arabe de Riyad (Arabe Saoudite) – qui réclame l'évacuation des territoires palestiniens occupés illégalement par Israël depuis 1967 contre la normalisation des relations israélo-arabes. Aussi les pays arabes ont soupçonné Nicolas Sarkozy de les conduire à réhabiliter Israël via cette union avec l'Europe.