« Nous les avons battus », a lancé, sur un ton triomphal, le président soudanais Omar El Bachir, arrivé, hier, dans la zone pétrolière contestée de Heglig, pour célébrer sa reprise par ses forces armées, vendredi dernier, après une dizaine de jours d'occupation sud-soudanaise. Portant l'uniforme, l'homme fort de Khartoum a prononcé un discours musclé contre son voisin du Sud. En dépit des pressions internationales, américaines et africaines notamment, pour la reprise du dialogue avec le « frère ennemi » du Sud, le président soudanais refuse de plier en excluant toute négociation avec Juba. « Avec eux, nous négocions avec des fusils et des balles », a-t-il clamé. Fort de ce succès, Omar El Bachir n'entend pas laisser son « indésirable » voisin sans punition. Des avions bombardiers soudanais ont lancé, hier, un nouveau raid contre Bentiu, capitale de l'Etat pétrolifère sud-soudanais d'Unité, frontalier du Soudan. Un premier bilan provisoire fait état d'un enfant tué et de trois civils blessés. « Ceci est une grave escalade et une violation du territoire du Soudan du Sud (...) je pense qu'il s'agit d'une provocation évidente », a accusé le directeur adjoint des services sud-soudanais de renseignement, Mac Paul, dont le pays affirme avoir retiré ses troupes de Heglig en raison des pressions internationales. C'est la troisième fois que les attaques soudanaises visent Bentiu, déjà bombardée à deux reprises mi-avril, alors que les forces sud-soudanaises occupaient encore Heglig. Washington a très vite réagi. Elle exhorte Khartoum à « cesser immédiatement les bombardements aériens au Soudan du Sud » et reprendre le dialogue avec Juba. « Nous reconnaissons au Soudan du Sud le droit de se défendre (...) mais nous demandons au Soudan du Sud de faire preuve de retenue (...) et d'éviter toute action disproportionnée qui ne ferait qu'envenimer davantage le conflit » a déclaré, hier, via un communiqué, la porte-parole de la diplomatie américaine, Victoria Nuland. L'Union européenne menace de sanctionner les deux pays s'ils ne tiennent pas à leurs engagements politiques. Peu avant le discours d'El Bachir à Heglig, le commandant de l'armée soudanaise, Kamal Marouf, a fait savoir que 1.200 soldats sud-soudanais ont été tués dans les combats pour la reprise de la zone pétrolière (qui représente la moitié de la production pétrolière soudanaise depuis la partition) sans pour autant donner le bilan pour ses propres troupes. Selon les Nations unies, citant la commission soudanaise des affaires humanitaires, les combats ont entraîné la fuite de toute la population civile de Heglig et des villages voisins. Jusqu'à 5.000 personnes seraient parties, essentiellement vers le Nord.