L'armée soudanaise a célébré hier, en présence du président Omar el-Béchir, la reconquête de la zone pétrolière disputée de Heglig. Le président soudanais qui a fait le déplacement a déclaré qu'il ne négocierait pas avec le Soudan du Sud en dépit des appels pressants de l'ONU, l'Union africaine et des Etats-Unis. «Pas de négociations avec ces gens», a déclaré M. Béchir à propos du gouvernement sud-soudanais. «Avec eux, nous négocions avec des fusils et des balles», a-t-il ajouté après la reprise de Heglig, occupée 10 jours par le Soudan du Sud. Khartoum avait annoncé, vendredi, la reconquête de Heglig, prise le 10 avril par l'armée sud-soudanaise, qui a pour sa part affirmé avoir mené, sous la pression internationale, un retrait volontaire et progressif achevé dimanche. «Le nombre de morts est de 1 200 pour le SPLM», les ex-rebelles sudistes désormais au pouvoir au Soudan du Sud depuis la sécession en juillet 2011, a lancé le commandant de l'armée soudanaise, Kamal Marouf, devant quelque 2 000 soldats. Il n'a en revanche pas précisé de bilan pour ses propres troupes. Les combats ont aussi entraîné la fuite des quelque 5 000 habitants de Heglig et des villages voisins, selon un rapport des autorités soudanaises cité par l'ONU. «Ceci est une grave escalade et une violation du territoire du Soudan du Sud (...). Il s'agit d'une provocation évidente», a estimé Mac Paul, directeur adjoint des services sud-soudanais de renseignement. «Nous avons répondu aux appels (internationaux) à évacuer Heglig (...) mais ils continuent de nous bombarder», a dénoncé le ministre sud-soudanais de l'information, Barnaba Marial Benjamin, estimant que Khartoum était en train de mettre à exécution ses promesses d'envahir le Soudan du Sud. Les Etats-Unis ont exhorté le Soudan à «cesser immédiatement les bombardements aériens» au Soudan du Sud et appelé les deux parties à reprendre les discussions. «Le Soudan doit cesser immédiatement les bombardements aériens et les tirs d'artillerie au Soudan du Sud», a déclaré dans un communiqué la porte-parole du département d'Etat, Victoria Nuland.«Nous reconnaissons au Soudan du Sud le droit de se défendre», a déclaré la porte-parole de la diplomatie américaine. «Mais nous demandons au Soudan du Sud de faire preuve de retenue (...) et d'éviter toute action disproportionnée qui ne ferait qu'envenimer davantage le conflit». Khartoum et Juba «doivent se mettre d'accord pour mettre fin immédiatement et sans condition aux hostilités, et se réengager dans les négociations sous l'égide de l'Union africaine», a ajouté la porte-parole.Le bombardement sur Bentiu, déjà visée deux fois par l'aviation soudanaise en avril, intervient alors que les troupes sud-soudanaises ont quitté la zone de Heglig, une région frontalière revendiquée par les deux Soudan mais largement reconnue comme soudanaise par la communauté internationale. Après une dizaine de jours d'occupation et de combats, les troupes soudanaises ont retrouvé les infrastructures pétrolières en très mauvais état. La semaine dernière, Juba avait accusé Khartoum de bombardements massifs ayant endommagé les sites pétroliers. L'arrêt de la production pétrolière de Heglig depuis le 10 avril a affaibli, encore un peu plus dans la crise, l'économie soudanaise, déjà en crise depuis que la partition a laissé les trois-quarts des réserves pétrolières au Soudan du Sud. La situation est tout aussi difficile pour Juba, en charge d'un pays dévasté par la guerre civile entre le Nord et le Sud qui aura duré 23 ans. Le Sud reste, cependant, tributaire des infrastructures soudanaises pour exporter son pétrole. Ces dernières demeurent, pour l'instant, fermées. R. I.