Décrivez-nous vos journées ramadhanesques loin de votre terre natale... D'abord, je dois souhaiter à l'Algérie un joyeux Ramadhan coïncidant cette année avec son cinquantenaire de l'Indépendance. Il doit avoir pour vous assurément un goût particulier. Je me réjouis de passer mon mois sacré dans un pays musulman où l'on entend le muezzin et l'appel à la prière, à l'instar de toutes les nations musulmanes. Au plan culinaire, les plats se rapprochent en termes d'ingrédients. En Egypte, on est plus porté durant le Ramadhan sur « el foul midamiss, et zabadi ». Donc, sur ma table ici en Algérie, je peux dire que la cuisine algérienne s'invite au côté de la cuisine égyptienne pour composer une belle et riche dégustation. J'insiste notamment sur la chorba, le bourek et le foie qui sont des plats algériens très délicieux. Parfois aussi, on me prépare des plats irakiens comme le « hris » fait de riz, de poulet et de frik. Il est très conseillé durant le Ramadhan, en raison de ses richesses nutritionnelles. J'adore aussi les boissons algériennes dont le jus de citron, le cherbat et el karkadi connu en Egypte pour calmer la soif. Pour ce qui est des sucreries, je peux dire que je ne me prive pas de la kounafa, el basboussa et la zalabia entres autres. A vrai dire, jeûner en Algérie est un véritable plaisir. J'ai passé le Ramadhan dans plusieurs pays, mais jamais je n'ai été comblé comme en Algérie, en termes de spiritualité et de convivialité. En fin de journée, après el iftar et l'accomplissement de mes prières surérogatoires à la mosquée El Qods de Hydra, je profite pour lire le Coran. Je tiens à signaler que durant ce mois, j'ai répondu à l'invitation de l'ambassadeur américain qui a rassemblé de nombreux ambassadeurs arabes et étrangers accrédités en Algérie autour d'une même table d'el iftar. C'est dire que votre pays est très accueillant, car fondé sur le respect des cultures et de toutes les religions. Le ministre des Affaires étrangères algérien nous a invités aussi la semaine dernière à la résidence Djenan El Mithak ainsi qu'un bon nombre d'ambassadeurs dont le groupe européen venus déposer son rapport sur les récentes élections législatives. Comment trouvez-vous l'humeur des Algériens ? En Algérie, nul ne peut nier l'ambiance de fraternité qui y règne. On constate son respect pour les cultes et son ample considération pour le discours religieux, en dépit de l'existence d'un courant extrémiste dont la portée est infime. Preuve en est, le président de la République veille lui-même à donner des cadeaux aux lauréats ayant participé durant ce mois à des concours d'apprentissage du Coran. Il s'agit là d'une louable initiative dont la symbolique est très significative. Dans le cadre de la coopération algéro-égyptienne, je dois rappeler que de nombreux imams ont été formés par la mosquée d'El Azhar. Certes, ils subissent auparavant des tests de niveau, comme tous les autres postulants. Récemment, certains imams ont été refusés par cette mosquée non pas par mépris mais parce que l'épreuve d'accès est valable pour toutes les catégories quelles que soient leurs nationalités. L'ambiance égyptienne vous manque-t-elle ? Oui, bien évidemment. L'ambiance ramadhanesque de mon pays est particulière. Dans chaque coin, on trouve des kheimete érigées pour accueillir les passants et les nécessiteux. Les tables de la Rahma se multiplient et la spiritualité atteint son paroxysme durant ce mois. L'on s'adonne presque tous aux visites des institutions religieuses dont Sayida Zineb, les mosquées El Hussein et El Azhar... pour nous purifier l'âme et consolider davantage notre foi. Cependant, dans ce pays frère, on est tellement comblé qu'on arrive à surmonter l'éloignement de notre terre natale.