Alors que les manifestations se sont poursuivies, hier, en Turquie, au dixième jour de la contestation populaire contre la destruction du parc Gezi sur la place Taksim pour y réaliser un musée ottoman, « l'Egypte et la Tunisie, où les islamistes sont arrivés en tête aux élections, doivent être inquiètes devant les problèmes rencontrés par la Turquie d'Erdogan, censée constituer un modèle abouti de fonctionnement » de l'islam politique, estime Antoine Basbous, de l'Observatoire des pays arabes, à Paris.Ce politologue ajoute que ces manifestations servent à rappeler aux libéraux et aux laïcs dans le monde arabe « qu'ils ont été les moteurs du changement » en 2011. Les laïcs égyptiens, par exemple, se sont soulevés avant les événements en Turquie. Après l'organisation de manifestations et la signature de pétitions, un rassemblement est prévu le 30 juin contre le président Mohamed Morsi à l'occasion du premier anniversaire de son accession au pouvoir. Mais, les islamistes au pouvoir dans le monde arabe, qui donnent comme exemple la « réussite de l'AKP turc », croient que « ce qui se passe en Turquie n'a rien à voir avec les besoins quotidiens ou économiques ». « Cela vise à promouvoir l'idée que les régimes islamistes, qui ont fait des prouesses économiques et prouvé au monde qu'ils pouvaient faire face à tous les défis externes, ont échoué », assure Mourad Ali, un responsable du Parti égyptien de la Liberté et de la Justice (PLJ), dans une interview au quotidien indépendant Al-Masri Al-Yom. En Turquie, le prix Nobel de littérature, Orhan Pamuk, confie son désarroi. « Je suis inquiet car il n'y a toujours pas en vue des signes d'un dénouement pacifique », a déclaré l'écrivain, dans une conférence à Rome, affirmant « comprendre la façon de protester des gens ». Sur la place Taksim, des manifestants affirment avoir voté pour l'AKP et avoir changé d'avis.Pour sa part, le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a appelé, hier, ses électeurs à donner « une leçon » à ces manifestants lors des élections municipales de mars 2014. Il a aussi affiché sa fermeté à l'égard de ses détracteurs. « Ils sont lâches au point d'insulter le Premier ministre de ce pays », a-t-il critiqué, utilisant le terme de « vandales » ou d'« anarchiques » pour désigner les protestataires. Les manifestants, qui demandent sa démission, sont de plus en plus déterminés à poursuivre leur mouvement. Parallèlement, ils étaient des milliers à se rassembler, samedi soir, à Izmir et à Ankara où des affrontements ont éclaté lorsque la police est intervenue pour empêcher une partie des manifestants rassemblés au centre-ville de marcher sur le Parlement. Selon les médias, cette intervention a fait de « nombreux blessés ». D'après les derniers bilans, la contestation populaire, en Turquie, a fait trois personnes et près de 5.000 blessés. Les Occidentaux ont, de leur côté, critiqué la brutalité de la répression policière.