Après la Côte d'Ivoire en 2011 et le Mali en janvier dernier, la France s'apprête à ouvrir un nouveau front en République centrafricaine. Officiellement, pour rétablir la sécurité dans ce pays « en voie d'effondrement ». Notamment depuis le renversement, le 24 mars dernier, du président François Bozizé par Michel Djotodia, le chef de l'ex-coalition rebelle Séléka, devenu depuis Président. Paris va porter, dès le vote d'une résolution au Conseil de sécurité, prévu vers la mi-décembre, son contingent militaire en République centrafricaine à 1.200 hommes. Contrairement au Mali où ils sont en première ligne, les Français interviendront cette fois-ci sous l'égide des Nations unies, via une résolution pour soutenir sur les plans militaire, logistique et technique, la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (Misca) qui pourrait compter jusqu'à 8.000 hommes. « Cette opération coup de poing sera brève, différente de l'opération Serval au Mali. C'est de l'ordre de six mois à peu près », précise Jean-Yves le Drian, le ministre français de la Défense. En janvier, au début de la guerre au Mali, il avait affirmé que le contingent français n'avait pas vocation à s'éterniser et qu'il quitterait le pays au bout de quelques mois. Dix mois plus tard, la France est toujours sur place pour ...« garantir la stabilité ». Pis, la situation en Centrafrique pourrait se révéler incontrôlable avec l'éclatement de la Séléka, la coalition de chefs de guerre. La raison ? Elle aurait déjà engendré des affrontements entre musulmans (environ 15% de la population) et les chrétiens (environ 50% de la population), deux communautés qui ont toujours vécu en bonne intelligence. Ces heurts, qui poussent les deux populations à former des « groupes d'autodéfense » pour s'en prendre aux autres, mèneraient, selon le Département américain, à une situation « pré-génocidaire ». Cette situation, qui a fait déjà près de 400.000 déplacés et 68.000 réfugiés dans les pays voisins, pourrait, prévient Laurent Fabius, le patron de la diplomatie française, « si le vide et l'implosion s'installent à Bangui, contaminer tous les pays d'Afrique centrale, c'est-à-dire le Tchad, les deux Soudans, le Congo, le Cameroun ». Une crainte que partage Jane Eliasson, le sous-secrétaire général des Nations unies. « Si on laisse la situation s'envenimer, elle pourrait évoluer en conflit religieux et ethnique avec des conséquences à long terme, voire une guerre civile susceptible de s'étendre à d'autres pays. Elle pourrait aussi transformer le pays en vivier pour les extrémistes et les groupes armés », dit-il. L'ONU a entamé, lundi dernier, des discussions consacrées à la crise, après l'appel de son secrétaire général, Ban Ki-moon, à envoyer 6.000 soldats, 1.700 policiers et 9.000 militaires en cas de nouvelle détérioration de la situation et ceux de Paris pressant la communauté internationale d'intervenir sans délai. Le projet de résolution déposé par Paris instaure un embargo sur les livraisons d'armes à destination de la République centrafricaine « pour une période initiale d'un an » et réclame « l'application rapide des accords de transition » qui prévoient, notamment des élections libres et équitables. « Dans l'immédiat, il faut un mandat sous le chapitre 7 de la charte (de l'ONU, qui autorise le recours à la force) permettant à la Misca et à la France de rétablir la sécurité sur tout le territoire où des crimes de guerre et crimes contre l'humanité sont commis », estime le Premier ministre centrafricain, Nicolas Tiangaye.