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M. Yahia Zane, président de l'Association nationale des agronomes algériens : «Les importations alimentaires vont croître de 64% les vingt prochaines années»
Photo : Slimene S.A. L'Association nationale des agronomes algériens a initié, à l'occasion de la journée nationale de l'agronome, célébrée chaque début du mois de septembre, un débat au Forum d'El Moudjahid sur les enjeux de la sécurité alimentaire dans les pays arabes. Pour le président de l'ANA, M. Yahia Zane, qui est aussi vice-président de l'association du même nom à l'échelle arabe, les pays arabes sont «les plus interpellés par la question» d'autant plus que cela relève de «la sécurité de l'Etat». M. Zane qui a fait un long exposé sur la notion de sécurité alimentaire telle qu'elle découle de la définition de la FAO de 96, a reconnu qu'il est difficile aujourd'hui de parler de sécurité alimentaire préférant celui d'autosuffisance alimentaire que les pays arabes sont à même de réaliser à travers une complémentarité, une interdépendance. Pour le conférencier, le choc alimentaire de 2008 a montré l'urgence de cette question à travers la maîtrise des stocks de produits essentiels, la protection contre leur fluctuation sur le marché. Aujourd'hui, les pays arabes «n'assurent que les 50% des calories qu'ils consomment et accusent un déficit de 22,5 milliards de dollars en la matière. Leurs importations vont enregistrer «une progression de 64% pour les vingt prochaines années.» C'est dire que les pays arabes ont besoin de programmes d'urgence pour assurer des «stocks de sécurité, une veille sur le marché et mettre en place un système pour se prémunir de la fluctuation des prix», dit-il. Le blé constitue 35% des calories consommées, c'est un peu trop, ce qui pousse certains à exiger une «modification des régimes alimentaires des populations». En effet, ce produit instable risque de manquer davantage avec les conditions climatiques, le développement des biocarburants…. Pour ce qui est de l'Algérie, notre pays a fait, reconnaît le président de l'ANA, «beaucoup dans l'amélioration de la production agricole et les conditions de vie des populations en milieu rural». Elle dispose pour la première fois d'une loi cadre en matière agricole qui apporte «des clarifications au mode d'exploitation des terres tout en réglant la question de l'utilisation de l'eau, la régulation et le contrôle des marchés etc.» Parmi les intervenants, on notera des inquiétudes sur l'intérêt accordé à l'équation recherche-développement, les produits phytosanitaires, la disponibilité de l'eau, la sélection des semences ainsi que le rétrécissement de la surface agricole utile (SAU) qui ne représente que 0,12 ha par habitant. SOUDAN : LA TONNE DE SUCRE «SIX FOIS MOINS CHÈRE» Le Soudan est en mesure de contribuer à satisfaire amplement la sécurité alimentaire des pays arabes, a déclaré un responsable de l'ambassade soudanaise à Alger, au Forum d'El Moudjahid. D'ailleurs, la FAO vient de placer ce pays parmi «les cinq pays ayant la capacité de satisfaire la demande mondiale», précise- t-il. Le Soudan a des potentialités importantes en matière de production de sucre, de l'huile, de viande et de céréales. Il dispose de 80 millions d'hectares de terres arables, de ressources hydriques suffisantes et sous-exploitées avec les eaux du Nil. Sur ce total, «seuls 16 millions d'hectares de terres sont exploitées», ajoute- t-il, ce qui la met dans une situation de demande de gros investissements pour «la mécanisation de son agriculture». A ce titre, le Soudan compte donner «des garanties solides et diverses» y compris sur la question de la propriété foncière par «une concession de 90 ans, aux détenteurs de capitaux», poursuit-il. Le Soudan qui fait un appel du pied aux investisseurs arabes désireux de réaliser la sécurité alimentaire, reste compétitif dans les divers domaines. A titre d'exemple, «le sucre revient à 52 dollars la tonne alors qu'il coûte 250-300 dollars sur le marché international». Autre argument, pour l'oléagineux, «la moitié se perd sur les champs», note le diplomate soudanais dont le pays revendique une place dans le programme de sécurité alimentaire. Pourtant, une unité de production de sucre ne coûterait que 100 millions de dollars, et au bout de trois ans seulement, «80% de capitaux investis sont déjà amortis». Pourquoi cette réticence ? L'histoire du contrat de l'importation de viande soudanaise avorté qui est récent n'est pas le seul rendez-vous raté en matière de coopération de l'Algérie avec ce pays qui avait misé de son côté sur l'importation d'un important quota de tracteurs agricoles. Selon un expert algérien, les solutions alternatives doivent être mises au point à tout moment, car il y a des aléas qu'on ne peut prévoir, comme la crise de l'offre en 2008. Pourtant, nous avions «des projections jusqu'en 2050», dit-il. Il rappelle que l'Algérie avait déjà en 87 opté pour «des concessions au Soudan» pour combler son déficit et faire face à ses besoins alimentaires plus particulièrement en matière d'aliments de bétail. Autant dire - et tout le monde le reconnaît aujourd'hui - que ce pays est réellement capable, pour peu que les fonds arabes s'impliquent à assurer grandement l'autosuffisance de l'ensemble des pays arabes. Peut-être que l'instabilité que connaît ce pays dissuade pour le moment les détenteurs de capitaux de s'y aventurer et de placer des sommes massives dont la rentabilité demande encore des années…