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Réflexion : Rien ne sert de courir, il faut simplement partir à point
Publié dans Horizons le 18 - 02 - 2011

Octobre 1988, l'Algérie entre dans une dynamique qui se traduit par une rupture brutale avec le monolithisme du parti unique. Essoufflé par un parcours qui ne lui a laissé aucun répit depuis novembre 1954, le FLN qu'on croyait condamner à disparaître, entame au contraire un processus de rajeunissement qui aut désarçonné les meilleurs conjoncturistes. Pour l'occasion, les observateurs constatent que si le monolithisme n'est pas éternel, il peut en revanche constituer une phase plus ou moins longue mais jamais une éternité, la phase ultime de son propre processus étant l'instauration de la démocratie. Sauf, forcément pour ceux qui, apprentis-sorciers ou benêts, croient en l'éternité du sabre et du goupillon. Or, même dans ces cas là, l'enjeu final termine souvent sa course en consolidant la démocratie. On ne parle pas ici de dynastie royale, vous l'avez remarqué. Encore que si l'on devait évoquer le récent soulèvement à Dubaï, on y apprendrait bien des choses. Pour ce qui nous concerne, on peut parler d'Octobre 1988 comme d'une étape allant dans ce sens ! Boumediene, qu'on a accusé post-mortem de tous les maux de la république, l'avait laissé entendre. Mais l'image ombrageuse du régime qu'il inaugura le 19 juin 1965, n'avait pas suffisamment imprégné l'atmosphère pour permettre aux citoyens de s'en inspirer et de saisir l'ampleur de la démarche qu'il avait entreprise pour atteindre son but. Entreprise d'ailleurs en cours qui confirme, par ailleurs, que la révolution en marche depuis 1954 ne s'arrêtera pas en si bon chemin. Mort à la force de l'âge, Chadli Bendjedid lui succède au sommet de l'Etat. En 1978 ! Mais à comparer les deux hommes quel changement ! Autant l'un, Boumediene, baignait dans la prospective et l'intérêt qu'il portait à la politologie pour en tirer le meilleur et aller de l'avant, autant l'autre, Chadli Bendjedid se souciait peu de la culture de l'Etat qu'il dirigeait avec bonhomie et, de temps en temps, l'usage de la ruse chère aux confréries religieuses. Et d'ailleurs, s'il s'est fait débarquer après 3 mandats consécutifs de président de la république, ce n'était pas parce qu'il était autocrate, il n'en possédait pas l'étoffe, mais bien parce que, ni lui ni son entourage, n'avaient compris qu'une révolution, pour produire la meilleure démocratie possible au bout de son ultime étape, ne doit jamais s'assoupir. Son départ forcé du pouvoir aura de toute façon démontré que les hommes, quel que soit leur «QI», ne sont pas tous aptes à diriger des révolutions. Or, l'âtre de la révolution algérienne, en activité depuis 1954, brûlait toujours de la même intensité et le pays pour franchir l'étape suivante, avait besoin d'un homme capable de combattre sur tous les fronts pour baliser le chemin par lequel la révolution poursuivra son effort jusqu'à son objectif final. Passons l'étape du HCE (Haut comité d'Etat) et ses atermoiements collégiaux et arrivons vite au mandat de Liamine Zeroual. Un mandat de cinq ans lui permet «d'encourager l'alternance», c'est ce qu'il répond lorsqu'on l'interroge sur ce point. Période cruciale qu'il va diriger d'une main de fer en combattant le terrorisme islamiste, cette calamité spécialement conçue pour étouffer la révolution algérienne. Zeroual légifère aussi. La paternité de la constitution de 1996 lui revient. Pendant toutes ces étapes, seule compte pour les dirigeants quels qu'ils soient, la pérennité du processus adopté à la Soummam en Août 1956 pour arriver au but ultime : la démocratie. Mais ce n'est pas pour autant que les peuples, souvent analphabètes au début des processus engagés, comprennent toutes les démarches allant dans le sens souhaité. On l'a vu en Algérie au début de l'indépendance, avec le retour quasi-spontané au régionalisme et même au tribalisme dans certains cas. Sans oublier la mobilisation des «perdants» due à l'aigreur ressentie par l'ancienne puissance coloniale qui n'a eu de cesse de souffler sur la braise des contradictions individuelles de certains, dans le but de parvenir à introduire les éléments constitutifs de processus néo-colonialistes inquiétants.
Durant cette période particulièrement cruciale pour la reconstruction de son Etat, l'Algérie plus que jamais révolutionnaire et vigilante, a enregistré diverses attaques orchestrées de l'étranger, c'est-à-dire de France en particulier et mises en œuvre à l'intérieur du pays. Mais pas seulement elle. Dans la mesure où d'autres pays ont eux aussi essayé de nous vassaliser. Pour l'illustration, on peut citer ce qui fut connu à l'époque comme «le maquis de Draâ-El-Mizan», une «œuvre» diabolique concoctée dans les officines de Fethi Dib au Caire et mise en œuvre chez nous par le propre ambassadeur d'Egypte en Algérie : Abdelkhalek Hassouna en qui notre président à l'époque avait une confiance aveugle ! Des hommes, des Algériens formés par la lutte révolutionnaire de libération nationale et propulsés comme cadres dirigeants pendant cette période, veillaient cependant au grain. Grâce à eux, les nombreuses attaques subies par notre pays furent pour la plupart neutralisées. Leurs séquelles sont cependant restées dans les mémoires grâce auxquelles nous apprenons que, animées par des laissés-pour-compte ou carrément des mercenaires, elles ont été pour la plupart combattues et neutralisées avec la dernière énergie. Dans le lot de ces provocations gratuites mais hautement intéressées, on peut ajouter les attaques synchronisées des troupes marocaines et tunisiennes aux frontières Est et Ouest de notre pays. Ces deux pays ayant été chapitrés pour imposer à l'Algérie révolutionnaire des diktats nés à l'ère de Mendès-France qui leur avait octroyé leurs indépendances respectives. Ainsi nos deux voisins ont été les premiers à œuvrer de concert pour introduire les germes du néo-colonialisme dans le Maghreb. Mais rien n'y fit. Plus que jamais ombrageuse, l'Algérie ne s'est jamais laissée harponner par la perfidie des amitiés factuelles. Pourquoi ? La réponse la plus simple à cette question, la voici : pour protéger la révolution qui, par nature, se doit d'enfanter la démocratie au bout de son processus. Et en même temps de laisser s'éclore la sérénité qui ferait de l'ensemble des femmes et des hommes de ce pays des citoyens conscients, aptes à travailler sincèrement pour édifier une démocratie digne du parcours accompli par l'Algérie depuis des siècles pour atteindre la qualité de son niveau d'aujourd'hui. Il est vrai que ce n'est pas tout le monde qui a la patience de «laisser le temps au temps» pour comprendre qu'un pays aussi grand ne se gère pas comme une boutique de quartier, surtout pas après une guerre de libération nationale qui lui aura coûté le meilleur en près de 8 ans de combats acharnés, à savoir : 1 million et demi à 2 millions de morts. Alors à quoi servent ces marches d'aujourd'hui qui, apparemment, font feu de tout bois pour essayer d'imposer leur dictature là où de «dictature il n'y en a point» ? Pour qui travaillent ces gens qui, après avoir trainé leur schizophrénie dans toutes sortes de coursives, se réveillent au moment où l'Algérie, récupérant âprement sa donne des vicissitudes de ces quarante dernières années, s'apprête à entrer de plain-pied dans une phase cruciale de son processus démocratique à savoir : son ultime approfondissement ? Il paraît qu'ils descendent du nouvel homo sapien néocolonial sur lequel les lobbys européens de même acabit et en particulier français, comptent pour se refaire une santé au détriment de l'Algérie libre et révolutionnaire. Cette idée aurait pu nous suffire pour conclure le principe qui nous a animés au départ pour écrire ce papier. Eh bien non ! L'actualité nous ayant submergés sous les fleurs artificielles et l'encensement affecté des «révolutions» tunisienne et égyptienne de ces derniers jours, au-delà des congratulations qui sont de mise dans de telles circonstances et que nous leur adressons, il est de notre devoir de dire à ceux qui croient avoir découvert le Pérou en se gargarisant des petites révoltes de ces pays, que nos «deux pays frères» qui sont en manque de «vraies révolutions» depuis des lustres ont besoin de patienter avant d'atteindre les performances et de l'avance prise par l'Algérie dans ce domaine. Bon vent quand-même !

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