Les Colombiens ont surpris en rejetant dimanche dernier la paix avec la guérilla des Farc lors d'un référendum sur l'accord visant à clore 52 ans de conflit. Le président Santos se retrouve dans une position inconfortable. « Je ne me rendrai pas et continuerai à rechercher la paix », a-t-il déclaré, affirmant que le cessez-le-feu bilatéral et définitif, observé depuis le 29 août, « reste valide et restera en vigueur ». De son côté, Timochenko, le chef des Farc, a déploré depuis La Havane « que le pouvoir destructeur de ceux qui sèment la haine et la rancœur aient influé sur l'opinion de la population colombienne ». Mais il a réitéré la disposition des guérilleros « à ne faire usage que de la parole comme arme de construction de l'avenir ». A l'issue de ce scrutin crucial pour l'avenir du pays, le « non » s'est imposé avec 50,21% contre 49,78% en faveur du « oui ». Près de 34,9 millions d'électeurs étaient appelés à répondre à la question : « Soutenez-vous l'accord final d'achèvement du conflit et de construction d'une paix stable et durable ? », titre du document de 297 pages issu de près de quatre ans de pourparlers, délocalisés à Cuba. Forte abstention L'ancien président Alvaro Uribe, féroce opposant à l'accord, a proposé « un grand pacte national ». « Il nous semble fondamental qu'au nom de la paix, ne soient pas mises en danger les valeurs qui la rendent possible », a-t-il affirmé. Le « oui » a recueilli quelque 6,3 millions de voix, bien au-delà du minimum des 4,4 millions voix requis (13% de l'électorat). Pour l'emporter, il devait supplanter le « non », qui a en fait dépassé les 6,4 millions. La participation n'a été que de 37,28%. « L'abstention a gagné et le pays a perdu », a déclaré à Kirsty Brimelow, avocate britannique et directrice du Bar Human Rights Committee, facilitatrice dans les pourparlers. « On peut y voir un triomphe d'Uribe », estime l'analyste politique Arlene Tickner, de l'Université du Rosario. L'accord, qui avait reçu un large soutien de la communauté internationale, mais dont le devenir est désormais incertain, entendait mettre fin à la plus ancienne confrontation armée de l'hémisphère nord. Au fil des décennies, ce conflit complexe a impliqué guérillas d'extrême gauche, paramilitaires d'extrême droite et forces de l'ordre, faisant plus de 260.000 morts, 45.000 disparus et 6,9 millions de déplacés. Après l'annonce des résultats, le président colombien a annoncé qu'il convoquerait hier « toutes les forces politiques afin de les écouter, d'ouvrir des espaces de dialogue et décider du chemin à suivre ».