Dans leurs veines coulent la plus pure mélodie marquant un passé où il faisait bon de s'enivrer de la poésie d'un art qui nous tient toujours en haleine. Ces lointains ancêtres ont défié le temps pour imposer à notre siècle la muse paradisiaque qui manque tant à notre culture. Par amour aux douze noubas, les survivants de l'Andalousie perdue ont choisi de se scinder en plusieurs écoles pour répandre cet héritage musical. Dans la légendaire cité de Nedroma naquit un genre tout à fait exceptionnel qui comporte le style haouzi enveloppé dans un style spirituel soufi. Au contraire de l'autre ville mère de toutes les vertus artistiques, Tlemcen, qui préside les destinées de la ville de la culture islamique, les conservateurs purs et durs du genre haouzi entretiennent un courant très familier du aâroubi, genre entretenu au beau fixe par feu Larbi Bensari, maître du rbab. On lui reconnaît la maîtrise du genre aâroubi, la loge magique des seigneurs de l'art érotico-mystique où s'affrontaient Ben Sahla, Ben Brahim et Ben Zerga. Elle tient ses secrets d'un acète connu pour sa sagesse et son éminence pour les arts «Sidi El Haloui», maître soufi et par extension commandeur des métiers. Elle nous revient pour nous livrer ses mille et un trésors chantés par la voix d'un des descendants de cette dynastie culturelle, Cheikh Ghafour. Le mode musical employé reflète une particularité propre qui dénote l'opulence et la distinction. Les pionniers de cette ville venus de Grenade avec à leur tête Ben Mechiche, précurseur du chant soufi, se sont ensuite repliés sur cette magnifique colline autour du plateau de Sidi Amar à qui on attribue le titre de génie en matière d'irrigation des splendides vergers… Il institua le même système hydraulique castillan pour créer de magnifiques jardins. L'histoire de cette coquette ville est liée au génie de ses habitants qui n'ont de cesse contribuer à pérenniser coutumes et bonnes manières de la civilisation mauresque. Nas El Belda, comme on les appelle, ont tout d'un héritage qui brigue le trophée de cité des arts. Aujourd'hui, c'est Nedroma qui monte au créneau avec ses grandes capacités artistiques et artisanales, l'heure est venue de réhabiliter cette magnifique citadelle et lui restituer son cachet d'antan… Dans les tempos des grandes modes mystiques, il y a ce qu'on appelle le «Rasd et Nahwand» si cher aux adeptes de la hadra. Dans cette partie de l'Andalousie retrouvée, l'eau continue de ruisseler, entonnant la triste mélodie de Grenade sous le dernier rayon de Soleil. Il y a comme une note d'inachevé dans le fief de cheikh El Ghafour par générosité et la bénédiction de son saint patron Sidi Belkaïd, elle se remet de sa léthargie pour nous rejouer la complainte de «Hine Ma Tasfar El Acvhia Etouahacht Ediar» (Lorsque arrive le crépuscule les souvenirs de l'Andalousie me hantent.)