Après la Libye, la Syrie sera-t-elle la prochaine victime du Grand Moyen-Orient revu et corrigé par Obama totalement et pleinement démystifié par son opposition à l'avènement de la Palestine libre et indépendante sur la scène internationale ? Sur les traces du nouvel Irak démembré et voué au chaos communautaire et confessionnel, l'émergence du nouvel ordre régional qui entend cultiver les mythes fondateurs du «printemps arabe» poursuit la logique destructrice de l'empire qui vise à la balkanisation du monde arabe pour imposer un règne sans partage et le pillage des richesses énergétiques. Du haut de la tribune des Nations unies, le chef de la diplomatie syrienne, Walid El Mouallem a pointé d'un doigt accusateur les faiseurs de «chaos total» en vue du démantèlement programmé de la Syrie. Il a affirmé devant l'Assemblée générale des Nations unies que les manifestations étaient devenues le «prétexte à des interventions étrangères» et un «tremplin (utilisé) par des groupes armés pour semer la discorde et saboter la sécurité.» A l'ère du «devoir d'ingérence humanitaire», superbement ignoré dans l'espace du «non-droit» de Guantanamo, de la gestion au Kärcher des banlieues en révolte ou de la répression policière de la contestation à Londres et des villes autres que britanniques, la vision manichéenne et discriminatoire fait force de loi enrobé d'humanisme et d'instrumentalisation onusienne. Dans le cercle de feu, tracé par la puissance impériale ou sous-traité, dans le cas libyen, par les forces euro-atlantiques, la Syrie, en allié de l'Iran et en acteur important de la résistance à l'hégémonie israélo-américaine. Dès le début de la contestation, amorcée à la mi-mars, Damas a stigmatisé le rôle des «groupes armés», accusé de tuer des civils et des militaires, avec le soutien d'Israël et d'autres pays, pour semer le chaos. Selon des experts, le recours aux armes par des manifestants ne fait plus aucun doute. Des informations évoquent «des opérations armées limitées sous forme de guérillas, d'embuscades, de tirs de snipers visant des shabiha (milice du régime) et des soldats, et des heurts armés dans des forêts et des vallées dans les zones frontalières», rapporte Riad Kahwaji, directeur exécutif d'Inegma (Institution pour l'analyse militaire au Proche-Orient et dans le Golfe). Plus est, des appels à une intervention étrangère sur le modèle libyen et, même, à «une révolution armée» ont été lancés dans les médias et les réseaux sociaux. Ce scénario, renforcé par le mouvement de transfert des armes à partir des frontières terrestres et maritimes, est particulièrement redouté. Pour Omar Idlebi, représentant des coordinations des comités locaux (LCC) de contestation et réfugié au Liban depuis le mois de juin, une militarisation du conflit aura des répercussions graves pour le pays partagé entre la tendance minoritaire alaouite (une branche chiite) et la majorité sunnite. «Si la révolution s'écarte de son parcours pacifique, elle sera vidée de son sens», dit-il. Si le syndrome libyen est jusque-là évité, en raison de l'opposition de la Chine, la Russie et les Brics à toute intervention étrangère en Syrie, le péril de l'irakisation du conflit syrien est fortement présent. Pour le ministre des Affaires étrangères syrien, le «modèle de coexistence pacifique entre les différentes composantes de la société», érigé en modèle dans la région, est l'objet de la campagne occidentale et de la «violence armée» en adéquation avec les sanctions édictées par les Etats unis et l'Union européenne.