Photo: Makine F. La question de l'abolition de la peine de mort refait surface et s'impose comme sujet d'actualité. Maître Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH) a relancé le débat en annonçant ouvertement il y a quelques jours qu'il est «pour» la suppression de cette peine, dont l'application est suspendue déjà depuis 1993. Contacté, hier, par nos soins, il affirme que cette idée n'est pas nouvelle et qu'elle a été déjà évoquée par lui et d'autres intervenants sur la scène politique Maintenant qu'en est-il des réactions de refus ayant émané de la mouvance islamiste, à l'exemple du MSP et de l'Association algérienne des oulémas musulmans ? Le président de la CNCPPDH affirme qu'il respecte parfaitement leurs convictions, mais cela ne l'empêche pas de poursuivre son initiative, devant se traduire, fait savoir Maître Farouk Ksentini, par l'élaboration d'une loi allant dans ce sens. «On essaye de convaincre le gouvernement de préparer un projet de loi sur l'abolition de la peine de mort», affirme-t-il en certifiant à l'endroit des observateurs entamant déjà une campagne hostile à ce sujet, qu'il ne peut céder en aucun cas «à des manipulations externes» comme colporté par certains. Arguant pour justifier ses dires qu'il est grand temps de se «débarrasser» de quelque chose qui ne s'applique pas depuis une vingtaine d'années. «Il faut juste avoir le courage» d'aller dans cette logique, puisque l'Etat a décidé en 1993 de suspendre les exécutions en justifiant que cette peine «est inappropriée», explique encore Maitre Ksentini, en campant toujours sur sa position de soumettre ce projet à un référendum populaire, pour en avoir la conscience tranquille. Cette démarche a-t-elle des chances réelles d'aboutir ? Les réactions du MSP et d'El Islah démontrent clairement qu'elle sera confrontée à de fortes «résistances». M. Abdelaziz Belkaid, président du groupe parlementaire du MSP, dont la position est déjà connue par la voix du leader M. Aboudjerra Soltani, affirme tout de go que sa formation est «contre» la suppression de la peine de mort. Pour cause, «elle contredit la chariaâ». Sur le plan religieux, s'interroge M. Belkaid, quel serait le mobile réel de l'annuler ? Comment faire, lorsqu'il s'agira de haute trahison ? enchaîne-t-il en estimant qu'il serait préférable de laisser aux hommes de loi la prérogative de déterminer les cas nécessitant l'application de cette peine, mais toujours est-il elle a un effet répressif, voire dissuasif qu'il faut prendre en compte», ajoute notre interlocuteur. A propos de la soumission de cette initiative à un référendum populaire, il estime que cette «question ne peut pas faire l'objet d'un référendum, s'agissant d'un principe déjà ancré dans la mémoire collective de la société. Selon lui, les concessions doivent avoir des limites. Même son de cloche du côté d'El Islah, M. Djamel Abdeslam, secrétaire général de cette formation, se dit catégoriquement contre l'appel lancé par Maître Farouk Ksentini, en se référant aux propos de Dieu qui dit que «dans la loi du talion, il y a des enseignements à tirer pour ceux qui réfléchissent». D'après lui, il faudrait bannir complètement l' idée de se passer définitivement de cette peine, étant donné qu'elle instaure de l'ordre dans la société en ce qui concerne le traitement des crimes. Cette loi entend lutter contre l'escalade de la violence individuelle, explique-t-il notamment en ces temps où l'Etat de droit est plus qu'une nécessité. El Islah est donc partisan de la peine de mort, considérant qu'une personne qui a tué mérite la mort, «seule peine équitable» selon lui. « Au moment où des Etats réclament l'application de cette peine, Maitre Ksentini souhaite son abolition. C'est bizarre», conclut-il.