Passion n Le chardonneret de la région, multicolore, frêle et excellent chanteur, est présent dans de nombreux foyers de la ville, de même qu'il sert de fidèle compagnon à plusieurs jeunes citadins. Le chardonneret de Souk Ahras, une espèce endémique, est surtout chassé dans la région de Aïn Snoune, à Lakhdara, Ouled Chebih et Ouled Idriss où il est surtout recherché pour son plumage chatoyant et son chant incomparable. Selon Rabah, un fin connaisseur de 68 ans, le chardonneret a toujours été apprécié par les citadins. A Annaba et alentour, on l'appelle «boumzyène» contre «moqnine» du côté de Constantine ou d'Alger. Ce bel oiseau de cage peut vivre de 5 à 11 ans. Son prix peut atteindre les 3 000, voire 5 000 DA s'il s'agit d'un spécimen parfaitement dressé au chant en cage, un «haggani» (authentique), comme le surnomment les amateurs dans ce souk empli des joyeux gazouillis de plusieurs espèces. Rabah rappelle que du temps de la colonisation, le chardonneret de Souk Akras était exporté vers la France. Aujourd'hui, il est menacé de disparition en raison d'une chasse massive et incontrôlée, et sa protection devient urgente et nécessaire, estime-t-il. Une fois «dressé», le chardonneret de Souk Ahras s'attache à l'homme dont il devient un excellent compagnon, et même si on lui ouvre la cage, il peut voler loin, mais revient toujours spontanément vers son maître. Pour un jeune amateur de 25 ans, Samir T., le chardonneret est reconnaissable à son chant particulier qui le distingue de son semblable de l'ouest du pays. Samir qui chasse cet oiseau dans la forêt de Guesmia, dans la commune de Hammam Naïl (Guelma), avoue que cette activité lui assure un revenu complémentaire moyen assez intéressant estimé à 12 000 DA par mois environ. Le commerce du chardonneret est ainsi devenu florissant et attire un grand nombre de jeunes chômeurs qui trouvent dans le braconnage des oiseaux une activité lucrative. Mais ce commerce se développe aux dépens de la survie de cette espèce qui n'est pas épargnée, même au moment de la couvée et de la nidification au printemps, une période durant laquelle la surveillance des forestiers devrait être «assurée plus que d'ordinaire», pense le vieux Rabah. Sur 200 spécimens capturés, 7 ou 8 seulement survivent en élevage. Il considère aussi que la chasse au chardonneret doit connaître une trêve de 2 à 4 ans, pour permettre une bonne reconstitution de la population, «un bienfait certain pour la biodiversité et pour la chaîne écologique». Les braconniers utilisent la glu et l'alfa pour capturer le chardonneret, une méthode qui contribue à le décimer.