Terroir n Les plats populaires concoctés dans la région du Hodna, selon des recettes transmises depuis des lustres de mère en fille, ne sont plus aujourd'hui un apanage familial. Ces mets que l'on ne pouvait savourer que chez soi, sont en effet devenus des menus favoris des restaurateurs de M'sila qui semblent avoir découvert le filon pour faire marcher leur commerce. Ils sont, ces derniers temps, de plus en plus nombreux à proposer des menus où s'entrecroisent la célèbre chekhchoukha, le zviti ou slata mehras, la louha, la kemmounia, la doubara et d'autres plats populaires, qui, dans un passé encore récent, ne pouvaient être dégustés qu'à «la maison». Ces plats du terroir sont même en passe de détrôner toutes les autres préparations culinaires, selon bon nombre de restaurateurs, qui affirment qu'ils font recette, grâce à leur «trouvaille», autant auprès des clients locaux que chez les voyageurs de passage dans les restaurants de M'sila, de Boussaâda, de Sidi Aïssa et d'autres villes de la wilaya. La chekhchoukha, plus que d'autres plats, semble avoir le vent en poupe. Ahmed B., un restaurateur qui en a fait sa spécialité, met un point d'honneur à faire en sorte que la qualité du mets servi par son établissement soit «au top» et n'ait rien à envier aux plats servis lors des fêtes et des grandes occasions familiales. Il veille à ce que la pâte soit d'excellente qualité, condition sine qua non pour la réussite de ce plat. C'est pour cela qu'il préfère passer commande auprès de femmes expertes en la matière qui la lui préparent à domicile. Il s'attache également à sauvegarder la variété de ce plat dont la sauce se décline sous diverses recettes, selon que le plat provient de M'sila, de Boussaâda ou de Ouled Derradj. Ce maître regrette cependant que la sauce préparée avec de la viande de camelin la «vraie» chekhchoukha m'silia, dit-il, ne soit pas pour le moment disponible dans les restaurants, car, en plus de la rareté de cette viande, peu de gens en connaissent la recette qui a été plus ou moins oubliée. Les viandes les plus utilisées demeurent donc, celle du mouton, parfois du veau, plus souvent du poulet. Le zviti est présenté sur une table spéciale. La chekhchoukha, quant à elle, est généralement accompagnée d'un autre plat traditionnel, la slata mehras, appelée aussi zviti à Boussaâda, une préparation piquante à faire transpirer. Et afin de lui donner un cachet encore plus rustique, ce «mets de feu», idéal et très prisé comme accompagnement, est présenté sur une table spéciale percée d'un trou en son milieu, destiné accueillir le pilon en bois (le mehras) où il a été préparé. La salade piquante est puisée directement du pilon par les clients qui la savourent en s'essuyant le front et, parfois, en ahanant, le gosier étant mis à rude épreuve par le piquant de ce plat que certains restaurateurs essaient néanmoins d'adoucir en réduisant la dose de piment par rapport à la tomate ou en y ajoutant de l'huile d'olive ou du beurre naturel. Malgré tout, les M'silis aiment bien le goût si particulier de leur slata mehras préparée à base de galette pilée, de piment vert et de tomate, le tout saupoudré de cumin. Ils la prennent à tous les repas de la journée et la considèrent comme un remède radical contre les rhumes et les coups de froid.