C'est une source fiable qui rapporte cette information insolite : une mendiante se fait jusqu'à 9 000 dinars par jour. De quoi concurrencer sérieusement le salaire d'un député jugé parmi les plus élevés de toutes les fonctions rémunérées par les institutions étatiques. Cette anecdote n'est pourtant pas isolée ni un cas particulier. La mendicité est devenue plus qu'un phénomène de société : une véritable industrie de l'apitoiement où les «travailleuses» utilisent toutes les ficelles dont celle qui consiste à exposer des enfants en bas âge pour mieux apitoyer le passant qui se laisse alors prendre au piège et finit par donner la pièce. Un peu pour soulager la détresse de l'autre. Beaucoup pour soulager sa conscience. Et les opérateurs de la mendicité, les managers de cette industrie de la charité le savent, eux qui utilisent tous les ingrédients pour réaliser de substantiels chiffres d'affaires. Cela va des nourrissons qu'on loue parfois à des familles payées à la journée, aux ordonnances médicales exposées à même le sol et parfois dûment accompagnées d'un inhalateur de ventoline pour asthmatiques. Jusqu'au repérage du «client» aux alentours des boucheries, des pâtisseries où vous êtes jugés «coupables» d'acheter de la viande et des gâteaux alors que des familles «crèvent de faim». Alors vous êtes pris en «flagrant délit d'aisance», vous culpabilisez et vous donnez ! C'est que les territoires de la mendicité sont clairement délimités. Les gares routières, les mosquées, les cimetières...ont leurs occupants attestés, et souvent des bagarres éclatent pour l'accaparement du meilleur espace. On a même vu des voitures de luxe déposer femmes et enfants correctement vêtus et qui enfilent aussitôt la «tenue de travail», des guenilles, des haillons mis à la hâte et c'est la journée qui commence. Il faut juste se renseigner auprès des commerçants qui échangent chaque soir la petite monnaie aux mendiants. Il y en a qui jurent qu'ils ne gagnent pas autant que cette engeance dont le seul effort est de tendre la main. Tant que ça rapporte... Enfin, de quoi je me mêle ? Khelli l'bir beghtah.