Hostilité - Une vague d'attentats, perpétrés surtout dans des zones majoritairement sunnites, a fait lundi 70 morts et plus de 230 blessés, ravivant de nouveau la crainte que l'Irak ne replonge dans le conflit confessionnel qui l'avait enflammé en 2006-2007. Mossoul, une ville à majorité sunnite à 350 km au nord de Bagdad, a été ensanglantée par cinq attentats à la voiture piégée dans la soirée, tuant 29 personnes, selon un médecin de l'hôpital de la ville et un général de l'armée. Cette série d'attentats, qui a également blessé 80 personnes, visait manifestement les forces de sécurité irakiennes. «Nous avons reçu de très nombreux cadavres. La plupart d'entre eux étaient ceux de membres des forces de sécurité», a déclaré un docteur de l'Hôpital général de Mossoul. Face à la situation, l'armée irakienne a décrété un couvre-feu pour toute la zone de la ville située sur la rive droite du Tigre. Mossoul est le chef-lieu de Ninive, une province du nord de l'Irak qui est l'un des hauts lieux du mouvement de contestation antigouvernemental initié par la minorité sunnite fin décembre. D'autres attentats ont touché Kirkouk et sa région, Tikrit et Touz Khourmatou, faisant 16 morts. Plus tôt dans la journée, un triple attentat sur un marché dans la ville à majorité chiite de Joudaïda al-Chat, dans la province de Diyala, a tué 13 personnes. «Al-Qaîda est derrière cette attaque terroriste», a déclaré Mohammed al-Zaïdi, un vendeur de légumes blessé dans l'attentat. «Le groupe extrémiste sunnite essaye d'insuffler la haine religieuse dans notre région, alors que nous vivons en parfaite harmonie avec les sunnites», a-t-il assuré. Sur un autre marché, à Taji, à la sortie nord de Bagdad, un autre attentat a fait 7 morts. Dans la soirée, à Madaïne, au sud de Bagdad, un attentat suicide à la voiture piégée visant la police et l'armée a fait 4 morts. A Bagdad, un double attentat à la bombe dans le quartier chiite de Sadr City a fait un mort et 8 blessés. Cette nouvelle journée sanglante s'inscrit dans le regain de violences que connaît l'Irak depuis le début de l'année et qui va en parallèle avec le mouvement de colère sunnite. Les sunnites s'estiment stigmatisés par les autorités dominées par les chiites. La démission du Premier ministre chiite Nouri al-Maliki ainsi que la fin de la discrimination dont ils s'estiment victimes font partie de leurs mots d'ordre. Ils jugent notamment excessive la façon dont la Justice et les forces de sécurité utilisent l'arsenal législatif antiterroriste à leur encontre. M. Maliki a bien tenté de calmer le jeu, en libérant des prisonniers sunnites injustement incarcérés et en augmentant le salaire de milices sunnites anti-Qaîda, mais le fond du problème n'a pas été réglé pour autant. En mai, plus de 1 000 personnes ont péri dans des attentats, selon les Nations unies. Leur représentant dans le pays, Martin Kobler, a d'ailleurs estimé que l'Irak était «prêt à exploser» et à renouer avec le conflit confessionnel des années 2006-2007. Au mouvement de grogne sunnite s'ajoute une paralysie totale des rouages politiques qui attise les ardeurs des insurgés, selon les observateurs et les analystes. Au tout début du mois, M. Maliki et la plupart des leaders politiques et religieux du pays, dont son rival le président sunnite du Parlement Oussama al-Noujaïfi, avaient participé à une grande rencontre pour tenter d'apaiser les tensions. Mais, au-delà de la symbolique, la réunion n'avait pas permis de parvenir à un accord.