Tension - Quelque 50 000 Brésiliens ont, de nouveau, manifesté hier soir à Sao Paulo, où la présidente, Dilma Rousseff, s'est entretenue lors d'un voyage éclair avec son mentor politique, l'ex-président Lula, au lendemain de manifestations historiques dans tout le pays. Un groupe de manifestants ont mis le feu à un camion de transmission de la chaîne de TV Record, à une cabine de police et à une agence bancaire, situés près de la mairie. Auparavant ils avaient tenté de forcer l'entrée de la mairie, mais la police les a repoussés avec quelques tirs de gaz lacrymogènes. Des boutiques ont été saccagées et pillées et la façade récemment restaurée de l'Opéra a été taguée. La manifestation s'est scindée devant la mairie. Le gros des manifestants a ensuite continué pacifiquement sur l'avenue Paulista. Dans une trentaine de villes plus petites, des manifestations avaient lieu également, comme à Sao Gonçalo, près de Rio, avec 5 000 personnes, ou à Juazeiro do Norte (nord-est), où 8 000 manifestants ont empêché le maire de la ville de sortir d'une agence bancaire, mais aussi à Manaus et Florianopolis. «Je suis venue d'abord parce que mon budget est très juste maintenant avec la hausse des transports», déclare Isabela Neves, une étudiante de 21 ans au visage peint en vert et jaune, les couleurs du Brésil. «Mais surtout parce que je me rends compte qu'on en a ras-le-bol, que c'est le moment de dire -basta!-.» «C'est le début du Printemps tropical!», lance un activiste de gauche à la foule, en référence aux mouvements populaires du monde arabe. Avec l'essor économique et social du pays qui s'est hissé au rang de septième puissance économique mondiale au cours de la dernière décennie, «ont surgi des citoyens qui réclament plus et ont droit à plus», avait analysé dans la matinée Dilma Rousseff. Mais des experts critiquaient hier soir à la télévision Globo news la lenteur des autorités à réagir. «Le gouvernement ne sait pas quoi dire, n'a pas de Plan B», a déclaré l'un d'eux. «Les manifestations s'organisent très vite et de façon suivie et on ne sait pas quand cela prendra fin parce qu'il n'y a pas d'organisateurs définis», selon ces experts. «Il y a un profond changement social en toile de fond, marqué par l'ascension d'une nouvelle classe sociale», avait expliqué dans la journée l'économiste André Perfeito. «De grandes parties de la population, principalement urbaine, sont mécontentes de l'état pitoyable des transports collectifs, du système de santé désastreux et de la grande violence, une situation compensée pendant des années par une amélioration des salaires et de l'emploi» qui a atteint ses limites, affirme, Ricardo Antunes, sociologue à l'université de Campinas. La journée de demain sera sensible, avec des marches prévues dans plusieurs villes du pays, notamment à Rio, où elle coïncidera avec le match Espagne-Tahiti comptant pour la Coupe des Confédérations qui se dispute jusqu'au 30 juin. Marche arrière toute ! Rien n'a filtré de l'entretien de Mme Rousseff avec l'ancien Président Lula (2013-2011) auquel, selon le site de la Folha de Sao Paulo, aurait également participé le maire Fernando Haddad, lui aussi membre du Parti des travailleurs (PT au pouvoir). La réunion a porté sur les moyens de faire marche arrière en baissant le prix des transports publics, selon la Folha. Porto Alegre, Recife et d'autres villes brésiliennes ont déjà annoncé, hier, mardi, des réductions sur les prix des transports publics, dont la hausse est à l'origine de la fronde actuelle, née à Sao Paulo et qui s'est étendue comme une traînée de poudre à l'ensemble du pays. Outre le prix du billet d'autobus ou de métro, les manifestants s'insurgent contre les dépenses colossales (11 milliards d'euros) engagées par le pays pour le Mondial dans un an, alors que certains services publics comme la santé sont sinistrés. En effet, selon certains experts, la Coupe du monde a servi de vecteur à l'expression de cette indignation, «avec ces stades monumentaux qui ont coûté des sommes faramineuses». Un corps d'élite de la police pour la sécurité du Mondial Le gouvernement brésilien va envoyer la Force nationale, un corps d'élite de la police, pour assurer la sécurité dans cinq des six villes de la Coupe de football des Confédérations secouées par des manifestations violentes, a annoncé ce mercredi l'agence de presse brésilienne. Des membres de cette force nationale qui assume le rôle de la police dans chaque Etat en cas de conflits sociaux ou dans des situations exceptionnelles seront dépêchés à Rio de Janeiro, Bahia, Minas Gerais, Cear et dans le district fédéral.