Résumé de la 9e partie n Après son renvoi par Mme Royer, Chantal veut, coûte que coûte, s'en sortir une bonne fois pour toutes... Elle venait de pénétrer dans la chambre du petit hôtel. Iru, selon son habitude, était allongé sur le couvre-lit. Chantal le poussa dans un coin du cosy-corner et se coucha auprès de lui. Elle réfléchissait. Cet hôtel pour petites femmes ou danseuses du bal du Moulin-Rouge n'était plus un cadre digne d'elle. Il lui fallait le luxe, le vrai, avec «son» appartement sur le Bois de Boulogne, et sa femme de chambre, «son» cabriolet automobile noir et blanc, «son» manteau de vison, «son» collier de perles et «son» carnet de chèques lui permettant d'éblouir les autres femmes ou ses anciennes compagnes de misère et d'aventure. Même son prénom, Chantal, ne cadrait pas avec une vie mesquine. Elle s'était toujours de-mandé qui, à l'Assistance publique, l'avait affublée de ce prénom distingué ? Elle aurait pu, comme tant d'autres, s'appeler Marie ou Madeleine, des noms tout ce qu'il y a de plus ordinaires, ou même, comme ses camarades de cabine, Lulu, Mado, Ninette... vraiment, pour une fois, la seule dans sa vie jusqu'à présent, elle avait eu de la chance dans ce choix d'un prénom. Elle se voyait déjà avec une particule, un nom dans le genre de Chantal de Boislieu ou même Chantal d'Harfleur ; elle cherchait, au plafond le nom qui lui conviendrait le mieux, qui sonnerait le plus juste... L'essayage laborieux de Mme Berthon venait de commencer dans un salon privé de «Marcelle et Arnaud». Tout l'état-major de la maison était là. — Le miracle s'est produit ! confia la grosse dame à la première. M. Berthon a été tellement enthousiasmé des robes que j'ai choisies hier, que j'ai voulu absolument m'accompagner pour juger de leur effet sur moi. Je voudrais revoir Nostalgie et Feuilles mortes sur le mannequin qui les portait hier. — Dites à Mlle Chantal de passer Nostalgie ordonna la première. Cinq minutes plus tard, le secret de «Marcelle et Arnaud» étant de ne jamais faire attendre les clientes, Chantal Nostalgie pénétrait dans le salon d'essayage, non sans avoir demandé, au bas de l'escalier, à une vendeuse : — Elle est seule, la cliente ? — Non, M. Berthon l'accompagne — Qu'est-ce qu'il fait au juste ? — Agent de change. Il possède l'une des plus grosses fortunes de Paris. Voilà l'homme dont j'ai besoin ! pensa Chantal en soignant son entrée dans le salon. Mme Berthon était déjà boudinée dans une robe de la nouvelle collection. Chantal jugea du premier coup d'œil quelle était ridicule ; en revanche, son mari, qu'elle se mit à détailler soigneusement, lui parut très présentable. Evidemment il n'était plus tout jeune mais sa calvitie et ses lorgnons lui donnaient un air respectable de vieil Américain ; Chantal s'en accommoderait, puisqu'elle était fermement décidée à se contenter du premier venu à condition, qu'il eût beaucoup d'argent et une réputation solidement assise. A suivre Guy des Cars