Situation ■ Hier, les insurgés menés par l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) se sont emparés de la cité de Tal Afar dans la province de Ninive (nord-ouest) et de son aéroport. Mais ils se sont retirés sans combats d'un poste-frontière avec la Syrie conquis la veille. Durant le week-end dernier, ils avaient pris de nouvelles localités de la province stratégique occidentale d'Al-Anbar, dont un premier poste-frontière qu'ils contrôlent toujours. Cette province est frontalière de la Jordanie et de la Syrie, un pays en guerre depuis trois ans et où l'EIIL, qui ambitionne de créer un Etat islamique à cheval entre l'Irak et la Syrie, est engagé dans les combats. Pour tenter de pousser à une entente entre les différentes forces politiques d'Irak et éviter au pays de se désintégrer, le secrétaire d'Etat, John Kerry, a rencontré ce mardi à Erbil le président de la région autonome du Kurdistan, Massoud Barzani, qui a évoqué une «nouvelle réalité en Irak» et appelé le Premier ministre, Nouri al-Maliki, à partir. M. Kerry, après une visite la veille à Bagdad, tente de rassembler les forces politiques dans un pays miné par les divisions, face à l'offensive des insurgés sunnites qui se rapprochent de Bagdad. «Avec ces changements, nous sommes devant une nouvelle réalité et un nouvel Irak», a déclaré M. Barzani, en recevant le secrétaire d'Etat au siège de la présidence à Erbil (nord). «Nous cherchons une solution à la crise», a-t-il dit. «Comme tout le monde le sait, il s'agit d'un moment très critique pour l'Irak, et la formation d'un gouvernement est notre principal défi», a, de son côté, dit M. Kerry à son interlocuteur. L'offensive des insurgés a permis aux Kurdes de prendre le contrôle de secteurs disputés avec Bagdad, qu'ils souhaitent intégrer à leur région autonome. Ainsi, leurs forces de sécurité contrôlent la ville multi-ethnique et pétrolière de Kirkouk. M. Kerry a souligné que les forces de sécurité kurdes ont joué un «rôle clé en aidant à tracer une ligne par rapport à l'EIIL», en référence aux jihadistes sunnites de l'Etat islamique en Irak et au Levant qui mènent l'offensive des insurgés lancée le 9 juin en Irak. Dans des déclarations à la chaîne américaine CNN, M. Barzani a appelé M. Maliki, «responsable de ce qui est arrivé» en Irak, à démissionner. «Nous vivons aujourd'hui une ère différente. Au cours des 10 dernières années, nous avons fait tout notre possible pour construire un Irak nouveau et démocratique, mais malheureusement l'expérience n'a pas réussi», a-t-il ajouté. Interrogé si les Kurdes chercheraient à devenir indépendants, M. Barzani a affirmé que «c'est au peuple de déterminer son avenir». «L'Irak est clairement en train de se désintégrer de toute manière et il est évident qu'un gouvernement fédéral ou central a perdu le contrôle sur tout». En vertu du système en vigueur ces dernières années, le président de l'Etat irakien est un Kurde, le Premier ministre est un chiite et le président du Parlement un sunnite. Le Kurdistan autonome a accueilli ces dernières semaines plusieurs milliers de déplacés fuyant l'offensive des insurgés.