Imaginaire ■ «Dialogue avec la création» est le titre de l'exposition de la plasticienne Linda Bougherara à la galerie Sacré art (126 Didouche Mourad) de l'Office national de la culture et de l'information (ONCI). Tout artiste et créateur fait intervenir dans son travail inventif ses fantasmes, ses illusions, ses attentes et tout ce qu'il retient en son for intérieur comme force. Linda Bougherara a cette particularité de prospection en soi de malaxer, brasser et d'assembler son imagination artistique en des toiles et créations qui n'appartiennent qu'à ses techniques. Il y a une telle profusion d'expressions dans le travail de l'artiste, une recherche, une faculté d'observation et de ressenti ayant rendu visible les perceptions et sentiments. Tout d'abord ces bustes de femmes, fusion de papier végétal, algues et pigments. Sculptures aux sources mémorielles, terre et océan étroitement apparentés à celle qui donne la vie. La rumeur des océans on ne peut ne pas l'entendre. La série de tableaux où les flots s'entrechoquent en des tons bleus que seule la Méditerranée est capable de générer, puissants dans leur azur complexe nous soulèvent jusqu'à entendre le ressac de cette mer assagie après la houle. Les forêts denses et leurs arbres immémoriaux sont également le chemin de création de Linda Bougherara. L'arbre solide en ses racines et ses mémoires, tronc vigoureux porteur d'un chant autre que celui de la mer, géniteur de feu et de chaleur. «J'ai vécu au cœur d'une forêt durant trois ans, je fais de longs séjours à Taghit, j'ai côtoyé durant des mois l'océan Atlantique ... », confie-elle. De pérégrination en pérégrination, Linda Bougherara a éparpillé sa douleur pour en extraire «l'instant poétique» et «le fragment d'éternité». Le désert se distingue également en une douzaine de toiles dispensant leurs tons chauds, jaunes, rouges, fauves, bruns et couleur de sable, de dunes vivantes et voyageuses. La respiration du fleuve, le vol de la libellule, l'existence et ses méandres, les ancêtres et leur legs, la douleur, la prédestination et l'étoile, nous les retrouvons avec toutes les sensations physiques et psychiques qu'elle a engrangées au cours de ses voyages initiatiques en différents lieux, Linda Bougherara nous les offre, nous faisant écouter «le Dialogue avec la Création» et ses conciliabules avec la terre africaine. D'où la question : comment s'opère un dialogue avec la création ? «Un dialogue étrange s'établit avec la conscience et la prémonition d'un territoire connu, délaissé et qui réapparaît. Des silhouettes apparaissent. On se plaît à y décrypter les flancs d'une colline ou bien un corps féminin, l'océan, des frondaisons agitées par le vent, des nuages dans une voûte embuée. Il y a une aventure de la couleur menée sans calcul par une âme sensuelle et chaleureuse», a écrit Lydia Harambourg, historienne d'art, dans une revue d'art. De son côté, Djamila Kabla issiakhem dira de la plasticienne : «...aucun matériau ne lui échappe. Elle ira au fond des océans puiser matière...pour nous décrire la survie...» Elle l'a décrit comme «une artiste atypique intelligente, douée sûrement, livrant son douloureux passé et nous transportant vers un avenir radieux, plein de surprises». Linda Bougherara, qui vit entre Paris, Alger et Marrakech depuis peu, a exposé ses œuvres un peu partout à travers le monde. Celles-ci sont souvent imprégnées de ses émotions et de ses souvenirs. L'exposition s'étalera jusqu'au 26 mars 2015 à la galerie Sacré art.