Résumé de la 29e partie La mère d'Aladdin fit tout ce que son fils voulut. Elle prit la porcelaine contenant les pierreries et se rendit au palais du sultan. Quelque amoureux que fût Aladdin, il fut contraint de se contenter de cette excuse et de s'armer de patience. Il eut au moins la satisfaction de voir que sa mère avait fait la démarche la plus difficile, qui était de soutenir la vue du sultan et d'espérer qu'à l'exemple de ceux qui lui avaient parlé en sa présence, elle n'hésiterait pas aussi à s'acquitter de la commission dont elle était chargée, quand le moment favorable de lui parler se présenterait. Le lendemain, d'aussi grand matin que le jour précédent, la mère d'Aladdin alla encore au palais du sultan avec le présent de pierreries ; mais son voyage fut inutile : elle trouva la porte du divan fermée et elle apprit qu'il n'y avait de conseil que de deux jours l?un, et ainsi qu'il fallait qu'elle revînt le jour suivant. Elle s'en alla porter cette nouvelle à son fils, qui fut obligé de renouveler sa patience. Elle y retourna six autres fois aux jours marqués, en se plaçant toujours devant le sultan, mais avec aussi peu de succès que la première ; et peut-être qu'elle y serait retournée cent autres fois aussi inutilement, si le sultan, qui la voyait toujours vis-à-vis de lui à chaque séance, n'eût fait attention à elle. Cela est d'autant plus probable qu'il n'y avait que ceux qui avaient des requêtes à présenter qui approchaient du sultan, chacun à leur tour, pour plaider leur cause dans leur rang ; et la mère d'Aladdin n'était point dans ce cas-là. Ce jour-là enfin, après la levée du conseil, quand le sultan fut rentré dans son appartement, il dit à son grand-vizir : «Il y a déjà quelque temps que je remarque une certaine femme qui vient régulièrement chaque jour que je tiens mon conseil, et qui porte quelque chose d'enveloppé dans un linge ; elle se tient debout depuis le commencement de l'audience jusqu'à la fin et affecte de se mettre toujours devant moi : savez-vous ce qu'elle demande ?» Le grand vizir, qui n'en savait pas plus que le sultan, ne voulut pas néanmoins demeurer court. «Sire, répondit-il, Votre Majesté n'ignore pas que les femmes forment souvent des plaintes sur des sujets de rien : celle-ci apparemment vient porter sa plainte devant Votre Majesté sur ce qu'on lui a vendu de la méchante farine, ou sur quelque autre tort d'aussi peu de conséquence.» Le sultan ne se satisfit pas de cette réponse. «Au premier jour du conseil, reprit-il, si cette femme revient, ne manquez pas de la faire appeler, afin que je l'entende.» Le grand vizir ne lui répondit qu'en baisant la main et en la portant au-dessus de sa tête, pour marquer qu'il était prêt à la perdre s'il y manquait. La mère d'Aladdin s'était déjà fait une habitude si grande de paraître au conseil devant le sultan qu'elle comptait sa peine pour rien, pourvu qu'elle fît connaître à son fils qu'elle n'oubliait rien de tout ce qui dépendait d'elle pour lui complaire. Elle retourna donc au palais le jour d?un conseil, et elle se plaça à l'entrée du divan, vis-à-vis le sultan, à son ordinaire. Le grand vizir n'avait pas encore commencé à rapporter aucune affaire quand le sultan aperçut la mère d'Aladdin. Touché de compassion de la longue patience dont il avait été témoin : «Avant toutes choses, de crainte que vous ne l'oubliiez, dit-il au grand vizir, voilà la femme dont je vous parlais dernièrement ; faites-la venir, et commençons par l?entendre et par expédier l'affaire qui l'amène.» (à suivre...)