La faim gagne du terrain aux Etats-Unis, où de plus en plus d'enfants sont confrontés à une grave malnutrition qui affecte leur développement intellectuel et les condamne davantage aux maladies, dans un pays où deux tiers de la population sont obèses ou en surpoids. Le nombre de foyers ne mangeant pas assez a recommencé à augmenter depuis 2000, pour représenter 11,2% des familles en 2003 contre 10,1% en 1999, selon les chiffres officiels les plus récents, diffusés mardi par des associations lors de la Journée nationale de prise de conscience de l'existence de la faim aux Etats-Unis. Cette situation ne devrait que s'aggraver après l'adoption du budget 2006, s'inquiètent certains pédiatres. Proposé par le président George W. Bush, il prévoit des coupes dans plusieurs programmes d'aide sociale, alors qu'il maintient les réductions d'impôts pour les classes favorisées, font-ils valoir. Ainsi dans la ville ouvrière de Baltimore (Maryland), une pédiatre voit défiler des bébés chétifs dans la clinique spécialisée en malnutrition infantile qu'elle dirige dans un quartier défavorisé. «Au cours de la première année d'existence, les enfants triplent leur poids de naissance et si les enfants ne mangent pas suffisamment à ce très jeune âge, leur poids puis leur taille en souffrent, entraînant de graves conséquences sur leur croissance et leur système immunitaire» explique-t-elle. Ils pourraient également éprouver des «difficultés scolaires et de comportement», ajoute-t-elle. Même cri d'alarme lancé par un professeur de Boston. «Nous voyons de plus en plus de bébés de moins d'un an, ce qui nous inquiète grandement, car ils sont plus susceptibles de mourir de malnutrition et parce que leur cerveau se développe très rapidement», dit-il. «La taille du cerveau d'un bébé est multipliée par deux et demi au cours de la première année de vie et si le bébé ne reçoit pas les nutriments nécessaires à la croissance de son cerveau, l'enfant peut éprouver des difficultés dans son comportement et dans l'apprentissage tout au long de sa vie», explique-t-il. Paradoxalement, les ravages de la malnutrition ne sont pas toujours dus à un manque de nourriture «mais à la qualité des aliments», explique-t-il. «Les enfants peuvent se mettre au lit le ventre plein... mais de frites et de sodas», dit le pédiatre. De fait, acheter des produits de qualité coûte cher et, dans certains quartiers, il est impossible de trouver des légumes verts et des fruits, même en conserve.