Résumé de la 62e partie Le magicien africain s?entretint avec le concierge du khan où il logeait. Ce dernier lui apprit où trouver Aladdin. Le lendemain, la douzaine de lampes fut livrée au magicien africain, qui les paya au prix qui lui fut demandé sans en rien diminuer. Il les mit dans un panier dont il s'était pourvu exprès ; et avec ce panier au bras, il alla vers le palais d'Aladdin et, quand il s'en fut approché, il se mit à crier : «Qui veut changer de vieilles lampes pour des neuves ?» A mesure qu'il avançait, et d?aussi loin que les petits enfants qui jouaient dans la place l'entendirent, ils accoururent et ils s'assemblèrent autour de lui avec de grandes huées et le regardèrent comme un fou. Les passants riaient même de sa bêtise à ce qu'ils s'imaginaient. «Il faut, disaient-ils, qu'il ait perdu l'esprit pour offrir de changer des lampes neuves contre des vieilles.» Le magicien africain ne s'étonna ni des huées des enfants ni de tout ce qu'on pouvait dire de lui et, pour débiter sa marchandise, il continua de crier : «Qui veut changer de vieilles lampes pour des neuves ?» Il répéta si souvent la même chose, en allant et venant dans la place, devant le palais et à l'entour, que la princesse Badroulboudour, qui était alors dans le salon aux vingt-quatre croisées, entendit la voix d'un homme ; mais, comme elle ne pouvait distinguer ce qu'il criait à cause des huées des enfants qui le suivaient et dont le nombre augmentait de moment en moment, elle envoya une de ses femmes esclaves qui l'approchait de plus près pour voir ce que c'était que ce bruit. La femme esclave ne fut pas longtemps à remonter ; elle entra dans le salon avec de grands éclats de rire. Elle riait de si bonne grâce que la princesse ne put s'empêcher de rire elle-même en la regardant. «Eh bien, folle, dit la princesse, veux-tu me dire pourquoi tu ris ? ? Princesse, répondit la femme esclave en riant toujours, qui pourrait s'empêcher de rire en voyant un fou avec un panier au bras, plein de belles lampes toutes neuves, qui ne demande pas à les vendre, mais à les changer contre des vieilles ? Ce sont les enfants, dont il est si fort environné qu'à peine peut-il avancer, qui font tout le bruit qu'on entend en se moquant de lui.» Sur ce récit, une autre femme esclave, en prenant la parole : «A propos de vieilles lampes, dit-elle, je ne sais si la princesse a pris garde qu'en voilà une sur la corniche ; celui à qui elle appartient ne sera pas fâché d?en trouver une neuve au lieu de cette vieille. Si la princesse le veut bien, elle peut avoir le plaisir d'éprouver si ce fou est véritablement assez fou pour donner une lampe neuve en échange d'une vieille sans en rien demander de retour.» La lampe dont la femme esclave parlait était la lampe merveilleuse dont Aladdin s'était servi pour s'élever au point de grandeur où il était arrivé ; il l'avait mise lui-même sur la corniche avant d'aller à la chasse, dans la crainte de la perdre, et il avait pris la même précaution toutes les autres fois qu'il y était aIlé. Mais ni les femmes esclaves, ni les eunuques, ni la princesse même, n?y avaient fait attention une seule fois jusqu'alors pendant son absence ; hors du temps de la chasse, il la portait toujours sur lui. On dira que la précaution d'Aladdin était bonne, mais au moins qu'il aurait dû enfermer la lampe. Cela est vrai; mais on a fait de semblables fautes de tout temps, on en fait encore aujourd'hui, et l'on ne cessera d'en faire. (à suivre...)