Différends Malgré 14 heures d'efforts acharnés, le Luxembourg, qui préside l'UE jusqu'à la fin juin, a dû se résoudre à constater l'échec du sommet peu après 00h 15 (22h 15 GMT). «L'Europe est dans une crise profonde», a confié aux journalistes Jean-Claude Juncker, le Premier ministre Luxembourgeois visiblement ébranlé. «L'Europe connaît une crise grave», lui a fait écho le président français Jacques Chirac, critiquant «l'égoïsme affiché par deux à trois pays». Pour M. Juncker, Jacques Chirac et le chancelier allemand Gerhard Schröder, le coupable désigné est Tony Blair. Le Luxembourgeois a accusé, sans le nommer, son collègue britannique d'avoir provoqué l'échec en exigeant une remise à plat de l'ensemble du budget de l'UE et surtout de la Politique agricole commune (PAC) défendue bec et ongles par la France. «Qui demande une telle solution veut l'échec», a dit M. Juncker. «Je crois qu'un accord aurait été possible», a dénoncé M. Schröder. «Le fait qu'il n'y en ait pas eu est uniquement dû à la position inflexible des Britanniques et des Néerlandais». «Ces pays ont une responsabilité devant l'histoire européenne», a-t-il accusé. Jusqu'au bout, le Royaume-Uni a refusé des concessions sur le rabais à sa contribution au pot commun, arraché en 1984 par Margaret Thatcher. Isolés au début du sommet, les Britanniques ont réussi à rallier les Pays-Bas, la Suède mais aussi, de manière plus inattendue, l'Espagne et la Finlande dans leur refus du projet de budget d'un total de 870 milliards d'euros sur sept ans. Tony Blair a refusé les différentes variantes de compromis que lui a proposées Jean-Claude Juncker, c'est-à-dire un gel du rabais et la promesse d'une révision à l'horizon 2008 de l'ensemble du complexe financement de l'UE. Au final, le Royaume-Uni a estimé que la déclaration soumise par la présidence ne fournissait pas les garanties nécessaires. «Les mots proposés (...) n'étaient pas clairs», a indiqué un responsable britannique. M. Blair a riposté aux attaques de M. Juncker et du couple franco-allemand en répétant son souhait de voir l'Europe changer ses priorités budgétaires. «Nous devons changer de vitesse pour nous adapter au monde dans lequel nous vivons», a-t-il dit. Il n'a pas craint d'ajouter : «C'est un moment de renouveau.» Contre toute attente, à la dernière minute, les nouveaux membres de l'UE, pour la plupart des pays post-communistes, ont, en vain, proposé de réduire leurs recettes attendues jusqu'en 2013.