Réalité n Pour acquérir l?expérience exigée, des milliers de cadres universitaires exercent, durant une certaine période, dans des sociétés privées pour une rémunération dérisoire. Cela s?explique par le fait que ces derniers n?ont pas eu l?opportunité d?effectuer des stages pratiques durant leur cursus universitaire. «L?université algérienne produit des cadres avec des connaissances théoriques, mais dépourvus de toute aptitude pratique. Ils sont, malheureusement, obligés de subir des périodes de stages qui s?étalent, pour certains, jusqu?à deux années contre une rémunération symbolique», souligne un enseignant universitaire, qui ajoute : «Il faut dire aussi que certains opérateurs économiques, profitant de l?état actuel du marché de l?emploi en Algérie, caractérisé par un taux de chômage très élevé, prolongent les délais d?adaptation des nouveaux employés. Cela témoigne de l?absence de compétences en matière de gestion des ressources humaines chez les responsables, plutôt dominés par un esprit commercial.» La mise en place d?un partenariat entre l?université et les entreprises s?avère plus que nécessaire pour lancer de nouvelles formations répondant aux besoins des opérateurs économiques, pour relever les défis imposés par les bouleversements et les mutations que subit la société, avec notamment l?apparition de nouveaux métiers basés sur les nouvelles technologies de l?information et de la communication. Quant à la formule «pré- emploi», elle est jugée «hypocrite» par des enseignants de l?USTHB. Mourad, 29 ans, comptable de formation, ayant exercé durant presque deux années dans une administration locale en tant qu?archiviste, a peur de postuler pour un emploi dans sa spécialité. «Croyez-moi, j?ai pratiquement perdu les repères de la comptabilité, car depuis l?obtention de mon diplôme en 2003, j?ai exercé dans d?autres domaines et il me faut un recyclage pour rafraîchir mes connaissances. Le préemploi est une mesure visant la garantie de l?argent de poche pour mes semblables, mais tout en les dépossédant des fruits du cursus universitaire», témoigne-t-il, amer. Le passage obligé par la formule du préemploi des jeunes diplômés universitaires est perçu comme une double perte : ni expérience gagnée ni connaissances déjà acquises préservées. «Nous avons voulu sauvegarder notre dignité en optant pour la seule occasion qui nous a été offerte. Aujourd?hui, nous n?avons rien gagné en contrepartie. Si nous avions exercé dans notre domaine d?études, nous aurions au moins gagné de l?expérience», affirment des jeunes diplômés de l?université de Bab-Ezzouar. Les maigres chances d?embauche et les mesures irréfléchies prises par les pouvoirs publics pour résorber le chômage ont ruiné des milliers de jeunes compétences. D?autres, des centaines, ont plutôt préféré quitter le pays pour exercer au sein de sociétés étrangères.