Résumé de la 4e partie n Rémy se rétracte, pourtant certains témoignages l'accablent et l'enfoncent. Mais son état psychotique le sauvera-t-il d'une lourde peine ? Il s'agirait d'un processus psychologique de culpabilisation — un cauchemar déformé, dit la défense. Il faudrait donc imaginer Rémy pénétrant dans ce pavillon qu'il a décidé de cambrioler, la porte étant déjà ouverte, la jeune fille déjà assassinée de neuf coups de couteau dans la salle de bains. Imaginer Rémy ramassant le couteau, volant la bague de la jeune fille, sortant du pavillon, disant à son complice «je suis un meurtrier», jetant le couteau, tout ça alors qu'il n'aurait pas tué ? Le point délicat dans cette histoire est que les aveux de Rémy, faits spontanément alors qu'il se trouvait dans un commissariat pour un autre délit, ont été entendus sans rigueur policière et n'ont pas été enregistrés officiellement. L'avocat général ne se prive pas à ce sujet de faire remarquer la «légèreté» de l'enquête policière. La famille de Martine écoute avec dignité ce qui doit lui être intolérable à entendre. Elle regarde ce garçon affirmer qu'il s'est accusé d'un meurtre qu'il n'a pas commis, et ce doit être insupportable à regarder ce visage qui dit oui, qui dit non, qui s'accuse et recule comme un cheval peureux devant l'obstacle. Eux, ils se sont exilés, ils ont quitté ces lieux où la vie leur était devenue invivable. Eux, ils ont vécu le vrai cauchemar. Et la sincérité, l'évidence, la vérité en un mot, ne leur est même pas offerte en soulagement. Ils attendent le verdict trois heures durant. L'avocat général a demandé vingt ans de réclusion pour Rémy. Trois heures interminables durant lesquelles ils revivent l'agonie de leur fille. Devant quel visage ? Sous quelle main ? Le premier inculpé, qui avait avoué, qui s'est récusé, est libre. Celui-ci semble être le vrai coupable : cette main doit être celle qui a tenu le couteau et a frappé. Cette main est-elle celle d'un malade mental ? Les jurés vont-ils le renvoyer à ses délires ?... Ont-ils un doute ? Ils n'en ont pas. Vingt ans de réclusion attendent l'assassin, qui aura tout le temps de se poser la question de la problématique de l'aveu. Son complice, pour avoir fait le guet, pour complicité de vol aggravé, aura cinq ans. Et à tous deux les circonstances atténuantes. Pour Martine qui n'avait que dix-huit ans, pour sa famille, l'aveu eût été respectable aux assises. Le moindre des remords, un faible soulagement. Et pour l'assassin la seule libération possible. La problématique de vingt ans de réclusion pour un garçon comme Rémy est la suivante : lorsqu'il sortira de prison, s'il en sort aux alentours de trente-cinq ou quarante ans, selon sa conduite, dans quel état sera-t-il ? Conscient de ce qui l'a amené à l'enfermement ? Apte à vivre une maturité tardive ? Ou en état de délire aggravé et définitivement largué sur une planète inconnue, ses aveux enfouis pour toujours dans un cerveau malade ? Prêt, pourquoi pas, à céder à la pulsion suivante...