Résumé de la 4e partie n Les éleveurs de Sour el-Ghozlane cherchent désespérément du goudron pour soigner leurs bêtes atteintes de gale. Sidi Aïssa se lève et dit aux hommes : «Suivez-moi !» Il les entraîne du côté d'un oued et, après avoir cherché parmi les rochers, il leur montre une excavation. «Jetez donc un coup d'œil à l'intérieur !» Les hommes se penchent. L'odeur caractéristique du goudron leur titille aussitôt les narines, et ils aperçoivent, au fond de l'excavation, le liquide visqueux. «C'est du goudron pur, à l'état naturel, dit le saint homme. — Nous connaissons bien cet endroit, disent les hommes, jamais nous n'avons pensé qu'il pouvait contenir du goudron ! — Combien de fois nous sommes passés par là, sans jamais avoir senti son odeur ! — Dieu fait ce qu'il veut, répond le saint. Il ne lui est pas difficile de faire surgir du sol un puits de goudron : il suffit seulement de lui en faire la demande, avec une foi pure et sincère». On comprend alors que cette source de goudron providentielle, c'est Sidi Aïssa qui l'a fait apparaître, avec la permission de Dieu ! On s'empresse de remplir des outres du précieux produit et on retourne soigner les bêtes qui ne tardent pas à guérir. C'est depuis que l'oued où se trouve le goudron a été appelé oued al-Guetrini, c'est-à-dire l'oued du goudron, guetrane en arabe et en dialectal de la région, gedran. Un jour, Sidi Aïssa reçoit la visite d'un santon de la région, Sidi Yahia ben Guedim. L'homme semble préoccupé et dès que Sidi Aïssa lui demande ce qu'il a, il se confie à lui. «Ah, Sidi, j'ai fait une promesse que je ne peux aujourd'hui tenir !» Le saint fronce les sourcils. «Tu as fait une promesse inconsidérée, et comme tu ne peux la tenir, tu viens demander mon aide ? -Tu as vu juste, Sidi !» Et Sidi Yahia ben Guedim lui raconte que n'ayant pas d'enfant mâle, il a fait le serment que s'il lui en naissait un, il régalerait les gens de sa fraction d'une brebis dont les oreilles auraient deux coudées de longueur. «Deux coudées de longueur ! s'exclame Sidi Aïssa, mais une telle bête ne doit pas exister ! — Oui, Sidi, dit le pauvre homme. Ma femme vient de mettre au monde un garçon, j'ai cherché partout la bête mais je ne l'ai pas trouvée !» Il prend un air si contrit que Sidi Aïssa éclate de rire. «Te voilà dans le pétrin. Je suppose que les gens de ta fraction réclament la bête promise ? — Oui, dit encore l'homme. Et si pour l'octave de la naissance du petit, son sbou'ê, je ne la leur offre pas, je serai la risée du pays ! Je connais ta réputation de saint, je sais que Dieu ne te refuse rien à cause de ta grande piété, c'est pourquoi je viens, aujourd'hui, demander ton aide ! — Tu ne manques pas de témérité en faisant un tel serment, dit Sidi Aïssa, mais j'accepte de t'aider !» (à suivre...) K. N.