Astuce n Visiblement, l'enseigne et l'activité sont contradictoires, mais les commerçants reconvertis ont trouvé la parade. «Les contrôles sont effectués la matinée. J'ouvre l'après-midi», dit Salim, un jeune homme d'une trentaine d'année. Il a ouvert un magasin, dans une ruelle d'Alger-Centre, pour vendre du kalbellouz, des olives, des piments (felfel m'raked) et autres produits prisés pendant le mois de jeûne. Salim est fonctionnaire dans une administration publique. Pendant son congé annuel, il en profite pour se faire une «m'sirifa» (argent de poche). Chaque année, il loue un local, dans une ruelle différente pour éviter les contrôles. Il active sans registre du commerce. Cette année, il a ouvert sa boutique sous une enseigne de cybercafé. Interrogé, Salim répond : «C'est un local fermé. Le cyber a fermé voilà deux ans. Je l'ai loué pour 14 000 DA le mois.» S'agissant de l'illégalité de son activité, Salim ne nie pas : «Je travaille au noir. Sans registre du commerce.» Il poursuit : «Eux (les responsables) ont volé des milliards et nous courent après pour deux sous de bénéfice.» «Personnellement, je suis fonctionnaire ; pendantmon congé annuel, je ne peux pas rester sans travailler. J'en profite, pendant ce mois de ramadan, pour me faire un peu d'argent : une m'sirifa.» Salim se souvient : «L'année dernière, j'ai loué un autre local, pas loin d'ici. Je n'ai pas fait de bénéfice car il y avait quelques problèmes, mais j'ai couvert mon investissement.»Cette année, dans cette boutique assez grande, Salim a réduit l'espace en accrochant des rideaux. Une astuce pour que sa marchandise soit visible pour les piétons de passage. Sur le côté, à droite, il a mis les olives, les piments au vinaigre, une terrine de harissa maison ; en face de l'entrée, un plateau de kalbellouz. Salim nous confie qu'il a investi 20 000 DA. S'il réalise 8 000 DA de bénéfice net, il sera content, selon lui. Enfin, Salim signale : «Pour les deux jours de l'Aïd, je changerai de marchandise. Je vendrai des jouets.» A deux pas du magasin de Salim, une petite boutique, à peine assez grande pour permettre à une personne de se tenir debout. Un homme, la quarantaine vend du kalbellouz. Selon toute vraisemblance, il s'agit d'une aile d'appartement, fraîchement peinte en blanc, avec une porte donnant sur l'extérieur de l'immeuble. Le vendeur a refusé de nous parler.