Résumé de la 4e partie n Après un repas royal, les deux hommes sont introduits dans une salle magnifique où dix adolescentes leur donnent l'aubade. Lorsque la chanteuse eut fini ce chant, le prince Ali poussa un long soupir et, ne pouvant davantage contenir son émotion, il laissa couler ses larmes en sanglotant. A cette vue, Schamsennahar, qui n'était pas moins émue, se prit également à pleurer et, ne pouvant résister à sa passion, se leva de son trône et s'avança vivement vers la porte de la salle. Et aussitôt Ali ben Bekar courut dans la même direction et, parvenu derrière le grand rideau de la porte, il se rencontra avec son amoureuse ; et leur émotion fut si grande en s'embrassant et leur délire si intense qu'ils s'évanouirent dans les bras l'un de l'autre ; et ils seraient certainement tombés s'ils n'avaient été soutenus par les femmes qui avaient suivi à distance leur maîtresse et qui se hâtèrent de les transporter tous deux sur un divan où elles leur firent reprendre leurs esprits en les aspergeant avec de l'eau de fleurs aux odeurs vivifiantes. Or, la première chose que fit Schamsennahar en revenant à elle fut de regarder autour d'elle ; et elle eut un sourire heureux en revoyant son ami Ali ben Bekar ; mais, comme elle ne voyait pas Abalhassan ben Tâher, elle demanda anxieusement de ses nouvelles. Or, Abalhassan, par discrétion, s'était retiré plus loin et n'était d'ailleurs pas sans appréhension sur la suite fâcheuse que pouvait avoir cette aventure si elle venait à s'ébruiter dans le palais. Mais, dès qu'il se fut aperçu que la favorite s'informait de sa présence, il s'avança avec respect et s'inclina devant elle. Et Schamsennahar lui dit : «O Abalhassan, comment estimerai-je jamais à leur mesure tes bons offices ! C'est grâce à toi que je dois de connaître ce que le monde possède de plus aimable parmi les créatures et ces instants incomparables où mon âme s'épuise par l'intensité de son bonheur ! Sois bien persuadé, ô Ben Tâher, que Schamsennahar ne sera point une ingrate !» Et Abalhassan s'inclina profondément devant la favorite en demandant pour elle à Allah l'accomplissement de tous les vœux que pouvait souhaiter son âme. Alors Schamsennahar se tourna vers son ami Ali ben Bekar et lui dit : «O mon maître, je ne doute plus de ton amitié, bien que la mienne dépasse en violence tous les sentiments que tu pourras éprouver pour moi. Mais, hélas ! quelle destinée est la mienne d'être attachée à ce palais et de ne pouvoir donner libre cours à ma tendresse !» Et Ali ben Bekar répondit : «O ma maîtresse, en vérité ton amour m'a tellement pénétré qu'il s'est combiné à mon âme et en fait partie si complètement que, même après ma mort, mon âme le conservera essentiellement à elle uni ! Ah ! que nous sommes malheureux de ne pouvoir nous librement aimer !» Et, ces paroles achevées, les larmes inondèrent comme une pluie les joues du prince Ali et, par sympathie, celles de Schamsennahar. Mais Abalhassan s'approcha d'eux discrètement et leur dit : «Par Allah ! Je ne comprends rien à vos pleurs, alors que vous êtes ensemble ! Que serait-ce donc si vous étiez séparés ? Vraiment ce n'est point le moment de vous attrister, mais de vous épanouir et de passer le temps dans l'agrément et la joie !» A ces paroles d'Abalhassan, dont elle avait appris à estimer les conseils, la belle Schamsennahar sécha ses larmes et fit signe à l'une de ses esclaves qui aussitôt sortit un moment pour revenir suivie de plusieurs suivantes qui portaient sur leur tête de grands plateaux d'argent chargés de toutes sortes de mets à l'aspect réjouissant. Et, ces plateaux une fois déposés sur les tapis entre Ali ben Bekar et Schamsennahar, les suivantes reculèrent tout contre le mur et s'y immobilisèrent. (à suivre...)