Résumé de la 8e partie n Schamsennahar reçoit la visite de l'émir des Croyants. Elle fait des adieux déchirants à son nouvel ami Ali ben Bekar. Et l'émir des Croyants se hâta de l'aider à se relever en lui tendant une main qu'elle porta à ses lèvres ; puis, tout heureux de la revoir, il lui dit : «O Schamsennahar, les soucis de mon royaume m'empêchaient depuis si longtemps de reposer mes yeux sur ton visage ! Mais Allah m'a accordé ce soir béni pour réjouir pleinement mes yeux de tes charmes !» Puis il alla s'asseoir sur le trône d'argent, alors que la favorite s'asseyait devant lui et que les vingt autres femmes formaient un cercle autour d'eux sur des sièges situés à égale distance les uns des autres. Quant aux joueuses d'instruments et aux chanteuses, elles formèrent un autre groupe tout près de la favorite tandis que les eunuques, jeunes et vieux, s'éloignaient, selon la coutume, sous les arbres, en tenant toujours les flambeaux allumés, au loin, pour ainsi laisser le khalife se délecter commodément du frais de la soirée. Lorsqu'il se fut assis et que tout le monde fut à sa place, le khalife fit signe aux chanteuses, et aussitôt l'une d'elles, accompagnée par les autres, dit cette ode fameuse qu'il préférait à toutes celles qu'on lui chantait, pour la beauté de ses rythmes et la riche mélodie de ses finales : «Enfant, l'amoureuse rosée du matin mouille les fleurs entrouvertes, et la brise édénique balance leurs tiges ! Mais tes yeux... «Tes yeux, petit ami, c'est la source limpide où désaltérer longuement le calice de mes lèvres ! Et ta bouche... Ta bouche, ô jeune ami, est la ruche de perles où boire une salive enviée des abeilles !» Et ces merveilleuses strophes ainsi chantées d'une voix passionnée, la chanteuse se tut. Alors Schamsennahar fit signe à sa favorite qui comprenait son amour pour le prince Ali ; et celle-ci, sur un mode différent, chanta ces vers qui s'appliquaient si bien aux intimes sentiments de la favorite pour Ali ben Bekar : «Quand la jeune Bédouine rencontre en chemin un beau cavalier, ses joues rougissent à l'égal de la fleur du laurier qui croît en Arabie. «O Bédouine aventureuse, éteins le feu qui te colore ! Sauvegarde ton âme d'une passion naissante qui la consumerait ! Reste insouciante dans ton désert, car la souffrance d'amour est le don des beaux cavaliers.» Lorsque la belle Schamsennahar eut entendu ces vers, elle fut pénétrée d'une émotion si vive qu'elle se renversa sur son siège et tomba évanouie entre les bras de ses femmes qui avaient volé à son secours. A cette vue, le prince Ali qui, dissimulé derrière la fenêtre, regardait cette scène avec son ami Ben-Taher, fut tellement saisi de douleur sympathique... A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut. Le soir venu, elle reprit son récit et elle dit : ... fut tellement saisi de douleur sympathique qu'il tomba également tout de son long évanoui dans les bras de son ami Abalhassan ben Taher. Alors Abalhassan fut extrêmement perplexe à cause de l'endroit où ils se trouvaient ; et comme il cherchait inutilement de l'eau dans cette obscurité pour en asperger le visage de son ami, il vit soudain s'ouvrir une des portes de la galerie et entrer, hors d'haleine, la jeune esclave confidente de Schamsennahar qui lui dit d'une voix effrayée : «O Abalhassan, lève-toi vite, toi et ton compagnon ; je vais tout de suite vous faire tous deux évader d'ici ; car tout est dans une confusion qui ne présage rien de bon pour nous, et je crois bien que c'est notre jour fatal ! Suivez-moi donc tous deux, ou nous sommes tous morts !» Mais Abalhassan lui dit : «O secourable jeune fille, ne vois-tu donc pas l'état de mon ami ? Approche-toi et regarde !» (à suivre...)