Résumé de la 39e partie n Neeve ne s'était pas rendu compte qu'elle était suivie par Denny. Comme d'ordinaire, elle prend un taxi pour rentrer chez elle. «Ne venez pas tout de suite, leur avait conseillé Nicky. Attendez que la presse ne rôde plus aux alentours.» Pendant tout le week-end, Marie et lui étaient restés dans la maison, deux étrangers silencieux, tandis que les caméras de télévision attendaient qu'il sorte. — Mais ce matin, ils étaient partis. Une affaire ancienne. Voilà tout ce qu'il était. Un ex-détenu malade. Nicky respira l'air salé et le sentit emplir ses poumons. Un type chauve dans une de ces incroyables tenues de jogging courait dans sa direction. Il s'arrêta. «Content de vous voir, monsieur Sepetti. Vous avez l'air en pleine forme.» Nicky se renfrogna. Il n'avait pas envie d'écouter leur blabla. Il savait à quoi il ressemblait. Après avoir pris sa douche, à peine une demi-heure auparavant, il s'était examiné attentivement et sans complaisance dans la glace de la salle de bains. Plus un poil sur le sommet du crâne, malgré une couronne encore épaisse sur les côtés. Au début de son temps de prison, il avait une crinière noire striée d'argent : poivre et sel, comme disait le coiffeur. Ce qu'il en restait était grisâtre ou blanc sale, au choix. Le reste de l'examen ne l'avait pas davantage réjoui. Des yeux à fleur de tête qu'il n'avait jamais aimés, même lorsqu'il était jeune et plutôt joli garçon. Ils saillaient comme des billes, aujourd'hui. Une légère cicatrice sur la joue rougit sur sa peau blême. La perte de poids ne l'avait pas rendu mince. Au contraire, il avait l'air d'un oreiller qui a perdu la moitié de ses plumes. Un homme frisant la soixantaine. Il était entré en prison à quarante-deux ans. «Ouais, je suis en pleine forme, dit-il. Merci.» Il savait que le type qui lui barrait le chemin sur le trottoir, le fixant avec un sourire béat et plein de dents, habitait deux ou trois maisons plus haut, mais il avait oublié son nom. L'irritation avait dû percer dans sa voix. L'homme sembla embarrassé. «Bon. Ravi que vous soyez de retour.» Son sourire était forcé, à présent. «Belle journée, hein ? Un peu fraîche, mais on sent pointer le printemps.» Si je veux des prévisions météo, je peux allumer la radio, pensa Nicky, puis il leva la main en un geste de salut. «Oui, oui», marmonna-t-il, et il marcha d'un pas rapide jusqu'à la promenade. Le vent avait fouetté la mer en une masse d'écume moutonnante. Nicky se pencha par-dessus le garde-fou, se souvenant combien il aimait se laisser porter par les vagues lorsqu'il était enfant. Sa mère ne cessait de brailler : «Ne va pas si loin. Tu vas te noyer.» Il se détourna avec impatience et se dirigea vers Beach Quatre-vingt-dix-huitième Rue. Il marcherait jusqu'à l'endroit où l'on apercevait les montagnes russes, puis reviendrait sur ses pas. Les gars allaient venir le chercher. Ils se rendraient d'abord au club et iraient ensuite déjeuner Mulberry Street pour fêter son retour. Un signe de considération à son égard, mais il ne se faisait pas d'illusions. Dix-sept ans représentaient une trop longue absence. Ils s'étaient mis sur des coups que Nicky ne leur aurait jamais permis de toucher. La rumeur avait couru qu'il était malade. Ils exécuteraient ce qu'ils avaient commencé durant ces dernières années. Le relégueraient gentiment. A prendre ou à laisser. (à suivre...)