Kamar n?a que 25 ans ; pourtant depuis le séisme elle prend en charge une famille qui se compose de 10 personnes. Il n?est que 15h30, mais elle a fini de préparer le f?tour : une chorba sans viande et sans un plat d?accompagnement. Elle discute avec quelques voisines de tout et de rien. «C?est déjà beaucoup qu?on puisse se permettre de la chorba, c?est un luxe. Mon père est un retraité et nous vivons de sa misérable pension de 6 000 DA, il est le seul qui travaille», dit-elle. Sur son visage puéril se dessinent tant de désespoir et d?amertume, mais aussi de désillusion. «Le théâtre est ma passion, mais depuis le séisme je suis partagée entre ma vocation et les responsabilités familiales. Je dois rester là pour tout préparer, car ma mère est malade, elle ne peut rien faire». Elle se tait un moment puis murmure presque pour que ses voisines ne l?entendent pas. «depuis que le théâtre de Bordj-Menaïel où j?exerçais s?est effondré lors du séisme, je suis perdue. J?avais un salaire et je pouvais aider mon père, dites-leur de nous aider, de faire quelque chose pour nous !» Pour elle, comme pour la plupart des familles interrogées, ce mois sacré a perdu toute sa saveur et sa signification, la tristesse est là et la douleur ne s?est toujours pas dissipée. Kamar a laissé de côté les cinq kilogrammes de pommes de terre et d?oignons, donnés par l?administration du camp les réservant pour les jours à venir qu?elle prévoit très durs pour sa famille. «On ne sait jamais, et puis ça reste insuffisant, même si je devais serrer la ceinture, ces légumes ne tiendront pas plus de trois jours.»