Résumé de la 78e partie n Ruth se rend chez Ethel, décidée, cette fois, à lui couper les vivres. La sonnerie retentit pendant une minute entière avant que Ruth ne fût récompensée par le déclic de la poignée. La porte s'ouvrit brutalement. Les cheveux en bataille, la chemise déboutonnée, un jeune homme la fusilla du regard. «Qu'est-ce que vous voulez, à la fin ?» demanda-t-il. Puis il fit un effort visible pour se calmer. «Excusez-moi. Etes-vous une amie de Tante Ethel ? — Oui, et il faut que je la voie.» Ruth fit un pas en avant, forçant le jeune homme à lui barrer carrément le passage ou à la laisser entrer. Il recula et elle se retrouva dans le living-room. Elle jeta un rapide regard autour d'elle. Seamus lui avait toujours parlé du désordre habituel d'Ethel, pourtant l'endroit était impeccable. Un amoncellement de journaux, mais bien rangés en piles. Un beau mobilier ancien. Seamus lui avait parlé des meubles qu'il avait achetés à Ethel. Et je vis au milieu de l'horrible fatras de sa mère, pensa-t-elle. «Je suis Douglas Brown.» Doug sentit l'appréhension le gagner. Il y avait quelque chose chez cette femme, dans la façon dont elle jaugeait l'appartement, qui le mettait mal à l'aise. «Je suis le neveu d'Ethel, dit-il. Avez-vous rendez-vous avec elle ? — Non. Mais je veux la voir immédiatement. Ruth se présenta : «Je suis la femme de Seamus Lambston, et je suis venue récupérer le dernier chèque qu'il a donné à votre tante. Dorénavant, il n'y aura plus de pension alimentaire.» Il y avait une pile de courrier sur le bureau. Ruth aperçut une enveloppe blanche bordée de marron sur le dessus. Le papier à lettres que les filles avaient offert à Seamus pour son anniversaire. «Je reprends ça», dit-elle. Avant que Doug ne pût l'en empêcher, elle s'empara de l'enveloppe, l'ouvrit d'un geste brusque et en sortit le contenu. Elle l'examina attentivement, détruisit le chèque et remit la lettre dans l'enveloppe. Sous les yeux écarquillés de Doug, trop interloqué pour protester, elle plongea la main dans son sac et en sortit les morceaux du billet de cent dollars que Seamus avait déchiré. «Elle n'est pas là, je présume, dit-elle. — Vous avez un sacré culot, protesta Doug. Je pourrais vous faire arrêter. — Je ne m'y risquerais pas à votre place, rétorqua Ruth. Voilà.» Elle lui fourra les morceaux déchirés du billet dans la main. «Vous direz à cette parasite de les recoller et de s'offrir son dernier gueuleton avec l'argent de mon mari. Dites-lui qu'elle n'obtiendra pas un nickel de plus de notre part et que si elle essaye, elle s'en repentira amèrement jusqu'à son dernier souffle.» Ruth ne laissa pas à Doug l'occasion de répondre. Elle se dirigea vers le mur où étaient disposées les photos d'Ethel et les examina. «Elle prétend agir pour toutes sortes de vagues causes imprécises, se balade partout en acceptant des récompenses diverses et variées, et pourtant elle mène à la tombe la seule personne qui ait jamais tenté de la traiter comme une femme, comme un être humain.» Ruth se tourna vers Doug. «Elle me dégoûte. Je sais ce quelle pense de vous. Vous vous laissez nourrir dans des restaurants de luxe dont mon mari, moi et mes enfants, nous payons l'addition. Et il faut encore que vous la voliez. Ethel a parlé de vous à mon mari. Je ne dirai qu'une chose. Vous vous valez.» (à suivre...)