Souffrance n Elle pousse un gémissement. Slimane, inquiet, va observer, avec impatience, par la fenêtre l'arrivée imminente de la sage-femme. Depuis le matin, la pluie n'a cessé de tomber. Et le ciel, qui roule de gros paquets de nuages noirs ne semble pas près de se calmer. Dans la maison de Si Slimane — c'est ainsi qu'on appelle dans le quartier, la villa cossue, dressée sur une petite colline — c'est l'effervescence. Et pour cause, la maîtresse de maison, Ouarda, la femme de Slimane, va accoucher. Une grossesse apparemment difficile, la femme n'étant plus une jeunesse. Mais une grossesse fortement désirée car de tous les enfants que Ouarda a mis au monde, aucun d'eux n'a survécu. Au deuxième étage, dans sa chambre à coucher, Ouarda, étendue sur le lit, geint doucement. Slimane, qui est à son chevet, lui tient la main. — Un peu de courage, la sage-femme va arriver d'un moment à l'autre... — J'ai mal... — Si tu veux qu'on t'emmène à l'hôpital... La jeune femme se redresse. — Non, non, pas l'hôpital, tu sais bien que je ne veux pas accoucher à l'hôpital... J'y ai perdu quatre enfants ! — Voyons Ouarda, ce n'est pas la faute à l'hôpital... — Si, si.. ça me porte malheur ! Il lui caresse la main. - Bon, bon... tu accoucheras à la maison... De toutes façons, les radios ont montré que tout est normal... Et puis, madame Duchamp est une sage-femme réputée... Ouarda fait un effort pour se relever. — Je lui fais confiance ! dit-elle. — Moi aussi... Elle pousse un gémissement. Slimane, inquiet, va à la fenêtre. — Il pleut des cordes... J'espère que madame Duchamp va retrouver son chemin... Aussitôt le téléphone sonne. Slimane décroche. — Allô... Il éloigne le combiné et murmure à Ouarda : — C'est madame Duchamp ! Il remet le combiné à l'oreille. — Madame Duchamp, nous vous attendons, ma femme a mal... Il fronce les sourcils. — Votre voiture est en panne... Je viens vous chercher tout de suite ! Ne bougez pas de chez vous ! Il pose le téléphone. — Je vais la chercher... tiens bon ! — La femme du jardinier, dit Ouarda, avec peine — Quoi, la femme du jardinier ? — Elle accouche, elle aussi... Peut-être que madame Duchamp pourrait aussi... — La faire accoucher ? Pourquoi pas, si entre-temps, elle n'a pas accouché. Il s'apprête à quitter la pièce. — Je vais demander à Samia de venir te tenir compagnie... (à suivre...)