Le ventre est également un symbole de gloutonnerie. Dans beaucoup de langues, le ventre sert de métaphore non seulement à la gourmandise mais aussi à l'avidité, à la convoitise et à l'ambition dévorante. «Il n'y a pas que le serpent qui marche sur son ventre», dit le proverbe algérien, et, ajoute l'adage populaire «le ventre, seul la terre peut le remplir», c'est-à-dire il n'y a que la mort qui puisse arrêter l'avidité. Mais le ventre dévorateur peut être aussi celui de la mère : elle donne la vie et entoure de soins ses petits mais son amour peut devenir excessif au point de les maintenir sous sa coupe et d'entraver leur développement. Certaines femelles d'animaux, comme le chat, peuvent dévorer leurs petits. Dans la littérature populaire, l'ogresse représente ce type de mère dominatrice qui dévore les enfants, les siens ou ceux des autres : plutôt que de les voir s'épanouir et devenir indépendant, elle les «fait retourner» dans son ventre, c'est-à-dire dans un état antérieur où ils dépendaient entièrement d'elle. L'ogre, le mâle de l'ogresse, est également un dévorateur d'enfants, qui aime se remplir le ventre de chair fraîche. Il est, lui, l'image du père qui veut garder pour toujours sa puissance et n'accepte pas de céder la place à sa progéniture. Plutôt que de laisser ses enfants grandir et s'épanouir, il préfère les dévorer ! C'est l'image du père dominateur et castrateur de la psychanalyse freudienne contre lequel les enfants rêvent de se révolter un jour. De tels monstres, souvenir de hantises infantiles, surgissent parfois dans les rêves et, on a peur de tomber entre leurs mains.