Métaphores et mise en scène pour parler d?un peuple. Le théâtre égyptien revisite l?histoire de la Nubie, cette région désertique qui s?étend entre l?Egypte et le Soudan à travers une pièce intitulée Nouba.com. Celle-ci, réalisée par Nasser Monaem, mise en scène par Hachem Chehata, est inspirée des trois nouvelles de l?écrivain nubien Idris Ali qui traite de l?anéantissement de ce peuple au profit du barrage d?Assouan édifié durant les années 1960 afin de développer la culture du coton dans cette région de la Haute Egypte où ce barrage a engendré une vaste retenue d?eau, le lac Nasser en l?occurrence, qui engloutit la Nubie égyptienne qui compte de nombreux temples dont les plus renommés sont Derr, Duadr, Es-Sebouah, Abre et Sambel qui datent depuis Ramsès II, lesquels grâce à l?intervention de l?Unesco et de l?aide internationale ont pu être sauvés de l?engloutissement des eaux du lac Nasser. Cependant, si ces monuments ont été sauvés, les Nubiens égyptiens, eux, n?ont pas eu cette chance. Ce peuple a été «exporté» par les autorités égyptiennes vers 40 autres villages situés aux environs de Kom Ombo. Cette entreprise, bien que salvatrice, arracha les Nubiens égyptiens de leur terroir. Ainsi, à travers cette pièce, Hachem Chehata tente de mettre en exergue le dépaysement des Nubiens et d?exprimer par la même leur mal être. Aussi, la pièce axera-t-elle son thème principal autour des avatars de ce dépaysement et c?est dans cette optique que Awad, l?acteur principal, jouant le rôle d?un jeune Nubien, qui refuse de taire son identité, créera un site internet pour Nubiens où il parlera de sa prime jeunesse et de ses souvenirs d?enfance. Puis, toujours avec cette idée constante de rencontrer les siens, Awad ira au Soudan pour connaître les autres Nubiens qu?il essayera désespérément de convaincre de la validité d?un Etat nubien. Déçu Awad s?exilera vers le Vieux continent, une terre tout aussi accueillante que celle qu?on lui avait imposée en Egypte. Pour vivre, Awad ira travailler sur un bateau. Il y rencontrera Simone une femme jouissant de 3 nationalités : égyptienne, française et britannique, les 3 nations qui ont lésé son peuple. La première en l?expropriant et les deux autres en le privant de son identité. Simone lui conseillera d?oublier son passé, de se concentrer sur son avenir en oubliant son identité et ses racines. Et c?est sans doute pour mieux marquer cette cassure au sein de ce peuple que l?auteur fera entrer en scène un autre personnage, un vieil homme nubien qui, à force de lutter contre l?oubli de ses racines, finit par mourir de chagrin. Métaphore de la Nubie ou triste sort de l?orgueil, la pièce prendra fin sur cette tragédie. Interprétée au Caire 40 ans après la construction du barrage d?Assouan sans doute afin de raviver les mémoires.