Préparatifs n Rue Bouzrina, la réputée ex-rue de la Lyre, un grand fourmillement est constaté devant l'entrée des magasins. D'une grande camionnette, Iveco blanche, deux jeunes, au gabarit d'un athlète de 100 mètres, n'en finissent pas de décharger de grosses boîtes en carton. «Nous avons fait notre commande en juin dernier et nos fournisseurs ne nous ont livré la marchandise qu'aujourd'hui», nous fait savoir le propriétaire du dépôt, un grossiste spécialisé dans le commerce de la papeterie, une activité léguée par son défunt père qui lui-même avait appris le métier, quand il était jeune, chez un pied-noir, non loin de là, à la très populaire rue De Charles, plus précisément. «Nous travaillons le produit local car il est mieux fait et mieux considéré. Les cahiers Alif de Annaba, sont, à titre d'illustration, de meilleur qualité que les produits d'importation. Les élèves peuvent mieux y écrire, alors que ceux d'importation, les made in China par exemple, ont un problème de confection», nous explique-t-il dans la foulée, tout en nous faisant une démonstration, histoire d'étayer ses dires. Notre grossiste se targue d'avoir des clients des quatre coins du pays.«Ils viennent de partout et certains font même leurs commandes par téléphone. C'est plus pratique», précise-t-il, non sans rappeler que son tracas habituel viendra juste après la rentrée, c'est-à-dire lorsqu'il devra revoir son agenda pour voir ses clients qui s'approvisionnent fréquemment à crédit et n'ont pas encore régler leurs dettes. «Le crédit, c'est ce qui nous empêche de dormir la nuit. Les gens viennent prendre la marchandise et disparaissent dans la nature. Nous nous retrouvons alors dans une impasse, car nous aussi, devons payer nos fournisseurs.» Chez un commerçant voisin, lui-même héritier de la papeterie de son père, a trouvé la parade pour dissuader les mauvais payeurs en changeant carrément de cap, passant de la vente en gros à celle au détail, en ajoutant, il est vrai une petite marge de bénéfice. «En remarquant que je travaillais à perte, j'ai dû changer mon registre du commerce pour devenir un détaillant. Au moins avec les petits clients je n'ai pas ce problème de créances», résume ce propriétaire. Outre ces traditionnelles places du Vieil Alger, la vente en gros des fournitures scolaires a depuis longtemps élu domicile dans les grands bazars à ciel ouvert d'El-Hamiz et de Bab Ezzouar. Là, aussi, des montagnes de sacs à dos, des tabliers, des ardoises «futuristes» ainsi que des jeux socio-éducatifs sont exposés dans un parfait agencement. Les produits locaux qui prennent le dessus sur ceux de l'importation sont évidemment les cahiers. «Ils sont de meilleure qualité et répondent au normes traditionnelles des feuilles quadrillées qui permettent à l'élève de mieux écrire», nous fait savoir le jeune gérant d'une boîte dont le propriétaire a cessé d'importer les fournitures de France et d'Espagne en raison essentiellement du renchérissement de la devise européenne. Chez lui, comme chez d'autres grossistes, les prix des produits importés de Singapour, Thaïlande, Indonésie, et Hongkong, via le port de Dubaï et de Mascat, ont augmenté et les petits revendeurs parlent déjà de spéculation et de lobbying et les ménages seront forcées d'en payer le prix.