Mobilisation n Samedi 31 mai 2008, l'horloge affiche 12h 30. Le train Express Alger - Oran n'est pas encore arrivé, mais les membres de l'association El-Badr d'aide aux malades du cancer de Blida sont à l'entrée de la gare Agha d'Alger depuis 7h 30. Ils distribuent des dépliants et donnent des conseils aux passagers. Hommes, femmes, jeunes et enfants semblent intéressés, au bonheur des initiateurs de la journée de sensibilisation des usagers du rail sur les méfaits du tabac. «C'est bon signe. Cela fait plaisir de ne voir aucun document jeté par terre», se réjouit Mustapha Moussaoui, le président de l'association, devant le regard approbateur d'un malade qui participe activement à l'action de sensibilisation. Gros fumeur, le malheureux a fini par être atteint d'un cancer du larynx. Depuis, sa fille de 11 ans lui sert d'interprète et l'accompagne dans tous ses déplacements au détriment de ses études. Des photos sont exposées à l'entrée de la gare et les employés, chargés de l'annonce des départs et arrivées des trains à l'aide de haut-parleurs, ont aujourd'hui une mission supplémentaire : appeler les voyageurs à arrêter de fumer et leur rappeler les dangers du tabac. 14h20, les voyageurs se précipitent pour s'y engouffrer. Encore une demi-heure avant le départ. M. Moussaoui profite pour remercier «les services de la Sntf pour leur aide». Le hasard fait bien les choses, dit-on. Le directeur régional de la Sntf, M. Friti, a justement perdu son père atteint d'un cancer du poumon dû à la cigarette. Il affirme devant l'assistance que sa société est disposée à faire en sorte que cette initiative devienne une tradition. A 15h00, le train Express file vers Oran. Une hôtesse apparaît derrière son grand chariot. Elle sert du thé, du café et des journaux... A l'approche de chaque zone urbaine, le train ralentit, comme c'est le cas à Boufarik et d'autres localités de la verdoyante Mitidja. Tantôt des gourbis, tantôt des maisons en dur qui alternent le charme des abords de la voie. Les contrastes de l'Algérie s'offrent à la vue des voyageurs subitement tirés de leur rêverie par la voie de Ali Azoun, le contrôleur de route, qui réclame gentiment les billets. A 15h 47, le train marque un arrêt de quelques secondes à la sortie de Blida. De beaux paysages longent la voie ferrée. Discutant avec les voyageurs, le président du conseil régional de l'ordre des médecins de Blida, le Dr Terkmane, par ailleurs membre actif de l'association El-Badr, se retrouve devant un voyageur qui suggère à ce que le fumeur passe en pénal pour homicide volontaire pour «tout le mal qu'il fait avec sa fumée à son entourage qui devient fumeur passif». «Il faudrait faire la même chose que pour le port de la ceinture de sécurité afin de lutter contre les fumeurs dans les lieux publics. Il faut instituer des amendes. Quand on touche au tezdame (portefeuille), la cigarette sera vue autrement», rétorque le docteur. 19h50, la musique diffusée durant tout le voyage depuis le wagon restaurant est interrompue. Les haut-parleurs prennent le relais pour annoncer : «mesdames et messieurs, nous arrivons dans quelques minutes à la gare d'Oran. Veuillez vous préparer.» 20h00, sans une seule minute de retard, Mme Malika Bouchikhi, la seule chef de gare femme de tout l'ouest algérien, accueille les voyageurs sur le quai.