Résumé de la 6e partie n A l'agence immobilière, Georgie-Ann ne trouve pas son amie mais Alexander Persoff, un très bel homme, qui insiste pour l'aider à trouver un appartement... Quant à moi, je ne m'intéressais qu'aux arbres. Alexander, une fois son long corps déployé, vint se planter devant moi, la pointe de ses mocassins marron clair touchant la ligne blanche, entre nos deux voitures. Près, mais modérément. Il devait sentir que, pour peu qu'il s'approchât un peu trop, je me hâterais de remonter dans mon auto et de filer. Je levai les yeux vers lui, mais c'est mon nez qui se pénétra tout d'abord de sa présence, car dans l'air du matin flottait soudain une odeur citronnée. Oui, un parfum de citrons frais, mûris au soleil. Je clignai des yeux et fus aussitôt transportée sur une haute côte rocheuse. Les vagues sombres venaient se briser sur la plage de galets, tout en bas. A l'écart de la frange de mer dentelée un homme et une femme étaient étendus sur une natte, entremêlant leurs bras bronzés. Pendant ce temps, Alexander attendait patiemment que je me mette à parler. Il était prêt à rester planté là des siècles, je le sentais. Il était aussi tenace que Pénélope repoussant les prétendants alors qu'Ulysse parcourait le monde. La patience n'est pas une de mes qualités bien que je sache l'apprécier chez les autres. — Vous n'avez pas l'air d'un agent immobilier, dis-je enfin. — Je n'en suis pas vraiment un. Je reculai d'un pas. Je ne voulais pas être piégée par ce sourire dont l'éclat promettait monts et merveilles. — Alors pourquoi est-ce que vous prétendez en être un ? demandai-je. C'est ma mère qui vous a appelé, non ? Alexander fronça les sourcils et j'entendis le vacarme de rochers dévalant une falaise à pic, quelque part dans le Caucase. S'il était en colère pour de bon, me dis-je, l'avalanche de sa fureur ferait éclater mes tympans. — Votre mère ? Je ne connais pas votre mère. Ce que je voulais dire, c'est que je vends des maisons pour gagner ma vie, mais que ma vraie passion, c'est la peinture. Faire des portraits, voilà ce que j'aime par-dessus tout. — Ah bon. Je me sentais complètement idiote. — Alors, vous voulez bien que je vous montre quelques maisons ? Charlotte m'a dit que vous aviez besoin d'en trouver une aussi vite que possible. Oui. Oui, c'était le cas. Et avant même que j'aie songé à réagir, j'avais autorisé Alexander à m'installer à l'arrière de son carrosse noir et à m'emmener voir une maison dont il jurait que j'allais l'adorer. Sur la route, il me raconta que son père avait été portraitiste, tout comme son grand-père, qui avait fui Saint-Pétersbourg vêtu d'un manteau dont la doublure recelait l'argenterie de famille. Nous autres, gens du Sud, raffolons des histoires d'argenterie, vu que la plupart d'entre nous ont mangé avec les couverts que leurs aïeules ont réussi à préserver des Yankees. (à suivre...)